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56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

Seigneur dirige et sanctifie !

Prédication prononcée le 3 juin 2012, au temple de l'Étoile à Paris,

par le pasteur Louis Pernot pour les Confirmations

« Seigneur dirige et sanctifie », c'est ce cantique que nous chantons dans toutes les belles circonstances : baptêmes, mariages, confirmations. Le titre est beau, mais il me met dans des abîmes de perplexité. En fait, il m'apparait comme une bombe oxymorique : soit le Seigneur dirige, soit il sanctifie, ce sont deux choses opposées, soit il dirige, et il faut obéir et c'est à moi d'agir, soit il sanctifie, c'est-à-dire qu'il rend saint, et alors je n'y suis pour rien, je n'ai qu'à recevoir ce qui vient de lui.

De même, quand le Psaume 23 dit que l'Eternel (qui est mon berger) a un bâton qui « me guide et me rassure », c'est difficile à comprendre. Un bâton, ce n'est pas très rassurant, surtout si c'est pour me diriger, je crains les coups. Et si c'est le bâton sur lequel je m'appuie, alors il ne me dirige plus, mais il se contente de me soutenir.

Cela nous donne deux Dieu, ou plutôt deux visions très différentes de Dieu, et il est difficile de choisir entre les deux.

Le premier Dieu on le trouve dans cet appel : « Seigneur dirige ». Et c'est sans doute là un des fondements de la foi et de la vie chrétienne. Croire en Dieu, c'est croire dans des valeurs, c'est avoir un idéal, une direction, un projet. Etre chrétien c'est adhérer au message de l'Evangile. Or dans l'Evangile, le Christ nous propose un chemin, une certaine conception de ce qu'est l'homme, de ce qu'il peut faire et vivre, il y a un projet pour l'humanité, pour nous, et être chrétien, c'est dire oui à ce projet, c'est vouloir obéir à ce que le Christ nous demande, se laisser diriger par lui. Et ce que nous demande le Seigneur, ce n'est pas mystérieux, c'est d'aimer, de pardonner, de servir, de partager, de donner. Il le dira plusieurs fois : « aimez même vos ennemis », « pardonnez... 70 fois 7 fois », « le plus grand parmi vous sera votre serviteur »

Il n'y a donc pas besoin de chercher loin pour savoir ce qu'est d'être chrétien. Etre chrétien, ce n'est pas fondamentalement de faire des prières, d'être un champion de l'émotion religieuse, ou de pratiquer, mais d'avoir une certaine manière de vivre, de structurer sa vie par les valeurs de l'Evangile et de les prendre comme lignes directrices de notre existence. Et si on est protestant, on voudra vivre en plus les valeurs protestantes d'honnêteté, de rigueur, de travail. C'est donc une sorte de choix.

En tant que chrétien, je ne me considère pas comme étant à mon propre service, je ne suis pas dans la vie pour être consommateur, mais pour être serviteur. C'est Dieu qui dirige, pas mon égoïsme ou mon profit, c'est lui mon maître, mon Seigneur, celui que je veux servir, c'est lui qui est mon chemin, ma vérité et ma vie.

Avec le Christ, avec l'Evangile, j'ai un chemin qui m'est proposé, être chrétien, c'est accepter ce chemin, même s'il est difficile, c'est vouloir de tout son cœur y avancer, et je crois que c'est un chemin de la vie, de la paix et du salut. C'est simple, c'est vrai, c'est beau, c'est l'essentiel...

Mais peut être est-ce un peu trop simple ?

En effet, quand je lis l'Evangile, j'y trouve aussi un autre Dieu qui est tout le contraire : un Dieu qui sanctifie. « Sanctifier », cela veut dire : « rendre saint ». Et comment peut-on devenir saint ? Certainement pas par soi-même, parce que tout homme est pécheur. Imparfaits nous sommes et resterons toujours, la sainteté est en fait fondamentalement inaccessible. Une vision finalement un peu moraliste et volontariste de la religion n'est-elle pas en fait vouée à l'échec et à la déception ? C'est bien beau d'avoir des valeurs et des règles de morale, mais si la morale est un garde-fou, a-t-elle jamais rendu bon qui que ce soit ? Paul le dit bien : « je suis à même de vouloir le bien, mais pas de l'accomplir, parce que le bien que je veux je ne le fais pas, et le mal que je ne veux pas, voilà ce que je fais » (Rom. 7:15ss). Je sais bien qu'il faut aimer, pardonner, et tout donner, c'est beau, mais je n'y arriverai jamais totalement. Ce chemin est trop difficile, il est impossible.

Et dans l'Evangile, nous trouvons aussi un message : n'essayez pas de vous sanctifier vous mêmes, laissez faire Dieu, se sanctifier soi même est impossible, qui veut faire l'ange fait la bête. C'est donc Dieu qui nous sauve, pas notre justice.

Dieu n'est pas un examinateur, il n'est pas un juge, un adjudant qui dit fais ceci, fais cela, ne fais pas ci, ne fait pas ça, la vie n'est pas un examen à réussir, une montagne à escalader, ce n'est pas un mas de cocagne avec la récompense en haut. Dieu sait que de toute façon ce n'est pas facile pour nous, et que sans arrêt nous chutons.

Le Dieu de l'Evangile, c'est un Dieu tendre, un Dieu d'amour, un Dieu qui nous aime, nous pardonne, nous reçoit, même si nous faisons mal.

Jésus ne s'est pas intéressé aux champions des bonnes œuvres, il ne s'est pas occupé que des gens bien moraux, au contraire, a passé son temps avec les pécheurs, les prostituées, les coupables, les exclus, les pauvres, les découragés. Et il dit à chacun : « viens à moi, n'écoute pas les champions du jugement de l'exigence et des bonnes œuvres, moi je t'accueille, je te donnerai la vie, le repos, le pardon, la paix. Moi, je te donne le salut, gratuitement par ce que je t'aime ».

Le Dieu auquel je crois, c'est, dans l'Evangile, celui qui est comme le père du fils prodigue. Le fils a fait n'importe quoi, il n'a pas de valeurs, pas de morale, mais le père va au delà, parce qu'il l'aime et dès qu'il le voit, il lui saute au cou, l'embrasse et l'accueille.

Et c'est de cela que j'ai le plus besoin. Que je sois pécheur, je ne le sais que trop bien. Sans cesse je ne fais pas ce qu'il faut. Quant au bien, je sais très bien ce que c'est, pas besoin qu'on me le répète sans arrêt, ni qu'on me culpabilise. Je sais qu'il faut aimer, pardonner, partager, on me le redit sans cesse, depuis mon enfance, et encore aujourd'hui, tout et tout le monde me rappelle ce que je devrais faire, me montre ce que je fais mal, pointe du doigt mes manquements, mes faiblesses. Je n'ai pas besoin d'une religion qui rajoute encore à ce poids de remords et de culpabilité.

Ce dont j'ai besoin, c'est d'un Dieu qui m'aime, me reçoive, me pardonne, c'est un Dieu de tendresse de douceur, un Dieu qui me dit : « ne crains rien : tu es pécheur, mais tu es pardonné, tu est pécheur, mais moi je te justifie. Par ton péché tu devrais être condamné, mais moi je te donne la vie. Tu es misérable et tu crois n'être rien, mais moi je te regarde comme un prince. Tu doutes, mais moi je crois en toi, tu te trouves moche, mais moi je te trouve beau, et je t'aime ».

Me sanctifier moi-même ? J'en suis incapable. Voici ce qui me sauve, voici la bonne nouvelle : mon Dieu me sanctifie et m'offre tout par grâce.

Croire en Dieu, c'est accepter cette grâce, c'est vivre avec l'amour de Dieu, se laisser être transformé par lui. La vie, je ne la gagne pas, je la reçois, le salut, je ne me le fabrique pas, je le reçois.

Finalement, je crois que Dieu n'est pas un challenge, non, ce n'est pas un but, pas un chemin qu'il faudrait suivre sans s'égarer, pas un directeur, c'est un océan d'amour, de tendresse, de bonté, de pardon, de sanctification et de vie qui m'est offert.

Alors Dieu, se Seigneur, il dirige, ou il sanctifie ? Est-ce moi ou lui qui agit ? Il commande ou il aime ? Le Seigneur est-il le chemin, ou est-il ma tendresse ? Il est difficile de choisir, sans doute faut-il un peu de chaque. Sans doute avons nous besoin des deux. Peut-être que cela peut dépendre des moments de notre vie, parfois nous avons plus besoin d'un Dieu qui nous structure, qui nous montre le chemin, et parfois d'un Dieu qui nous rassure et nous console. Peut-être aussi que c'est parce qu'il est l'un qu'il peut être l'autre pour nous. C'est parce qu'il nous aime qu'il peut nous indiquer une bonne route, parce qu'il nous aime qu'il a un projet pour nous, pour que nous orientions notre vie dans un sens qui aille vers la vie, la joie, en prenant part à la création d'un monde meilleur. Et peut-être aussi que c'est parce qu'il est notre maître, notre roi, notre créateur que sa parole d'amour et de pardon a une force inouïe, que sa tendresse est une vraie preuve de grâce et qu'elle nous bouleverse.

Le Dieu de l'Evangile n'est pas un Dieu simple, il est en tension entre ces deux pôles, et c'est de cette tension que naît la vie, comme la lumière naît de la tension des deux pôles opposés d'où jaillit l'étincelle.

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 Psaume 23

Psaume de David.

L'Éternel est mon berger je ne manque de rien

sur des prés d'herbe fraîche Il me fait reposer

Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre

Il me conduit par le juste chemin

pour l'honneur de Son Nom

Si je traverse les ravins de la mort je ne crains aucun mal

car tu es avec moi

Ton bâton me guide et ma rassureTu prépares la table pour moi devant mes ennemis

Tu répands le parfum sur ma tête

ma coupe est débordante !

Grâce et bonheur m'accompagnent tous les jours de ma vie

j'habiterai la maison de l'Éternel

pour la durée de mes jours.

Jean 14:1-6

Que votre coeur ne se trouble point. Croyez en Dieu, et croyez en moi.

Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père.

Si cela n'était pas, je vous l'aurais dit.

Je vais vous préparer une place.

Et, lorsque je m'en serai allé, et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai, et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis vous y soyez aussi.

Vous savez où je vais, et vous en savez le chemin.

Thomas lui dit: Seigneur, nous ne savons où tu vas; comment pouvons-nous en savoir le chemin?

Jésus lui dit:

Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi.

Ps. 23