Les miracles sur la mer
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Que penser des miracles racontés dans les évangiles ? Certains chrétiens croient à tous les miracles, tels qu'ils sont rapportés dans les textes, alors que d’autres ne croient pas que les choses se soient déroulées ainsi, mais pensent qu’il faut lire les miracles comme des images. Peu importe comment se sont passés les faits à l'époque de Jésus, l’essentiel, c’est ce qu’ils veulent dire pour nous aujourd’hui. Il faut toujours se demander ce que cela signifie pour nous ici et maintenant dans notre situation. Comment s’approprier le texte ? Où sommes-nous dans le texte ? Se demander ce qui s’est passé réellement (ou comment cela s'est passé) nous semble être une mauvaise question. L’important, c’est ce que nous pouvons attendre, nous, de Dieu aujourd’hui.
La tempête apaisée
Matthieu 8:23-27
Ce récit est l’un des premiers miracles cités après le célèbre sermon de Jésus sur la montagne.
Les disciples sont très nombreux : ce sont tous ceux qui suivaient Jésus pour l'écouter prêcher, tels des élèves qui écoutent leur maître. Entre ceux-ci, Jésus a choisi douze apôtres qui seront ses plus proches collaborateurs. Parmi les plus célèbres apôtres, citons Pierre (Simon), Juda qui trahira Jésus, et aussi l'évangéliste Matthieu (les autres évangiles étant écrits par des disciples de Jésus).
Dans ce passage, l'image de l'eau sert le message que Jésus veut nous donner pour notre vie aujourd'hui. Nous savons que l'eau en petite quantité est source de vie, elle désaltère, elle fait fleurir et croître les plantes... Mais l'eau en grande quantité, la mer, plus particulièrement ici dans la tempête apaisée, représentait pour les Hébreux la mort, le mal, l’épreuve, le déluge, la noyade. Ils ne savaient pas nager et pour eux, la mer était effrayante, royaume du noir et des monstres marins. Et cette eau est symbole ici : il ne s’agit pas vraiment de la menace de l’eau réelle, matérielle, mais c’est une image, comme dans le Psaume 69 (1-4 et 15-18) où le psalmiste a peur de s'enfoncer complètement dans les eaux...
Jésus a-t-il réellement calmé la tempête pendant que les disciples étaient dans la barque ? Peu importe... Car aujourd’hui, nous n’attendons pas de Dieu qu’il calme matériellement les tempêtes, ou qu’il aide les rescapés du Titanic à marcher sur l’eau (et nous n’habitons pas tous en bord de mer !). Il faut donc interpréter tout cela comme des images d’autres réalités, comme des leçons pour notre vie. Ces miracles ne sont pas à lire comme des récits de faits historiques héroïques, mais plutôt comme des images, des sortes de paraboles.
Des tempêtes, nous en connaissons tous. Parfois nous sommes dans des situations difficiles et quelque chose nous menace, nous sommes malmenés par certains évènements. Comme on dit alors : on a peur de perdre pied, de se noyer dans les difficultés. Que fait Dieu dans ces moments-là ? On peut croire parfois qu’il dort, qu’il ne fait rien. En fait, il ne faut pas perdre confiance. Dieu, de toute façon, veille sur nous et ne nous laissera pas seuls face au danger. Pas de crainte, s’il est dans notre barque, il sera toujours là pour nous aider et faire en sorte que nous ne nous sentions pas menacés par les évènements et les éléments.
Mais peut-être s’agit-il pour nous d’avoir l’audace et le courage de « réveiller » cette présence de Jésus en nous, cette présence qui peut parfois nous sembler « endormie », et qui ne demande qu’à être « ressuscitée » (le même verbe que réveiller en grec), comme les disciples ont réveillé Jésus ?
Dieu ne supprime pas les difficultés : les disciples sont toujours sur la mer d'ailleurs. Mais Dieu fait en sorte que, malgré les difficultés, nous gardions confiance et restions sereins.
La marche sur les eaux
Matthieu 14:22-32
Voici donc encore un autre miracle en lien avec la mer, mais des précisions supplémentaires sont apportées.
A noter tout d'abord que Jésus va prier tout seul : il a besoin de ce moment de tranquillité pour se ressourcer, pour trouver de la force dans la présence de Dieu. Une leçon pour nous ?
Ensuite, Jésus marchait-il vraiment sur l'eau ? Une fois encore, la question est sans réel intérêt.
Le thème du miracle précédent est repris : les disciples, confrontés à la mer, sont dans l'épreuve, peut-être pas loin de couler. Et voilà donc la première bonne nouvelle du texte : Jésus vient les rejoindre là où ils sont. Dieu n’est jamais loin, et même si nous sommes dans une situation difficile, il vient et il s’approche de nous pour nous aider, même si nous ne le reconnaissons pas toujours (en effet, dans le texte, les disciples pensent d'abord voir un fantôme !). Dans le récit précédent, Jésus dormait, mais il était dans la barque, là, il n’est même pas présent ! Dans les deux cas, il peut venir nous aider quand nous en avons besoin, où que nous soyons, et même si nous nous sommes éloignés de lui. Jésus traverse les obstacles pour venir nous rejoindre.
A ce qui précède s'ajoute encore une autre bonne nouvelle : Jésus nous permet, comme à Pierre, de marcher sur l’eau. C’est encore une image : l’eau, c’est le mal, l’épreuve, la mort. Avec Jésus, on peut marcher au-dessus des difficultés sans se perdre, sans s’y noyer, et même continuer à avancer.
En réalité, Pierre parvient à marcher au-dessus des difficultés parce qu’il va vers Jésus. C’est son but, sa visée, son idéal, et quand on fonce vers son idéal, on peut traverser des choses extraordinaires. Mais on n’y arrive pas toujours et parfois, on peut perdre confiance, avoir peur, manquer de courage, ou de force. Quand Pierre, au lieu de rester tendu vers son objectif, se regarde lui-même, il prend peur et s’enfonce. Et c'est un peu comme pour le ski nautique : il ne faut pas regarder les skis, ni s'arrêter, sinon la chute est assurée !
Mais heureusement pour Pierre, les bonnes nouvelles se succèdent : en effet, Dieu n’est pas qu’un idéal vers lequel on se dirige, mais il est aussi une force qui peut nous aider, nous relever. C’est même la force de la prière ! Pierre dit : « Seigneur, sauve-moi ». Et Jésus lui prend la main et le relève. Il le reprendra un peu après, (« homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? »), mais il l’a relevé sans condition, juste parce que Pierre le lui demandait. Dieu vient véritablement en aide, à Pierre... et à l'homme en général.
Nous pouvons ici noter une différence de théologie par rapport à l’Ancien Testament. Dans l’Exode (chapitre 14), face à la Mer Rouge, on a une situation comparable : le peuple, face à l’épreuve, est rempli de crainte et crie vers Dieu devant la difficulté. Dieu alors, par Moïse, écarte l’eau et le peuple marche à pied sec. En effet, on croyait dans l’Ancien Testament que Dieu agissait pour arranger les évènements en faveur du croyant, en enlevant les obstacles.
Dans le Nouveau Testament, Dieu n’enlève pas l’eau, les problèmes restent là, mais Dieu agit : non pas sur les évènements, mais sur le fidèle pour l’aider à traverser les épreuves en passant par-dessus.
Et ce qui menaçait de perdre le croyant devient ce qui le porte : et tout ce que nous subissons peut, avec l'aide de Dieu, devenir un atout pour avancer encore mieux dans la vie, avec la force de la prière et de la foi, de même que Pierre a regardé vers Jésus et qu’il a crié vers lui.
Louis Pernot - Muriel Bernhardt