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Les mages, un chemin vers l'offrande

Matthieu 2:1-12

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MagesDans l’évangile, ils ne sont « ni rois, ni trois » : ils sont « mages ». Matthieu est le seul à parler d’eux, à décrire cette découverte et cette adoration du Christ par des païens, alors que Luc racontera plutôt les bergers, des Juifs du peuple qui vont aller voir Jésus. La tradition a dit qu'ils étaient rois : dans l'Ancien Testament, il est bien indiqué que des rois viendront se prosterner et offrir des cadeaux au Messie (Ps.72:10). La tradition rajoute qu'ils étaient trois (comme les trois cadeaux symboliques) et qu'ils s'appelaient Gaspard, Melchior et Balthazar, mais ces noms ne leur ont été attribués qu'à la fin du Ve siècle. Ils auraient très bien pu être douze, car on sait que, dans la tradition babylonienne, douze astrologues allaient une fois par an ensemble sur une haute montagne pour observer les étoiles et déceler des signes.

Des étrangers cherchent le Christ…

En effet, ces mages étaient en réalité des prêtres babyloniens et sont venus d'Orient, de Perse. Ces savants-astrologues étaient adeptes de l'antique religion mazdéenne (zoroastrienne), fondamentalement attachée à l'astrologie, adorant la lumière (dieu Mazda). Ils croyaient que les étoiles déterminaient le cours des choses, ce qui n'est pas vrai selon la Bible, l'astrologie étant fermement condamnée comme une abomination par l'Ancien Testament.

Ce récit montre ainsi que même des prêtres d’autres religions viennent adorer Jésus, qui n’est pas le « Sauveur » uniquement pour les Juifs, mais il est né aussi pour les païens, c’est-à-dire pour tout le monde. Même ceux qui n'ont pas grandi dans la tradition juive de l'époque se sont mis en route pour le trouver. Ils ont tourné le dos à la lumière d’Orient pour chercher une lumière plus grande encore !
Peu importe leur nombre, l'essentiel, c'est plutôt ce chemin qu'ils font pour trouver Jésus qui vient de naître. Et par leur intermédiaire, nous comprenons que le Christ est une réponse universelle à la quête de l'homme, qu’il représente l'accomplissement des espérances des autres religions : la paix, l'amour, le pardon, l'espérance, l'éternité !

Les mages se sont certes fondés sur une hérésie, ici l'astrologie, mais grâce à elle, ils ont cheminé vers le Christ. Et ce que nous fêtons le jour de l’Épiphanie, « apparition » en grec, nous permet de comprendre que Jésus peut apparaître de bien des manières différentes à quiconque se met en route pour le chercher : même si l'on ne croit pas forcément comme il faudrait, même si l'on n'a pas la bonne doctrine de l’Église, ce n'est pas un obstacle pour découvrir le Christ.

Leur science, l'astrologie, ne fonctionne pas vraiment, ils n’arrivent pas au bon endroit ! Les mages vont à Jérusalem, la ville royale, et là, ils sont un peu perdus et ne savent pas où chercher ce roi des Juifs ! L'étoile ne les a pas guidés tout de suite jusqu'à Bethléem, contrairement à ce que l’on pense toujours. Mais arrivés à Jérusalem, ils posent des questions, en s'adressant d'abord au roi Hérode qui demande alors des précisions aux « sacrificateurs » (prêtres) et aux « scribes » (théologiens), Hérode n'ayant aucun intérêt à accueillir un nouveau roi bien sûr ! Les mages étaient prêts à écouter les personnes compétentes pour se faire aider, à écouter des gens qui n'étaient certes pas de leur propre religion. Des théologiens qui connaissent bien les Écritures leur expliquent que c'est à Bethléem que ce roi devait naître selon les mots du prophète Michée (5:1), l'évangéliste Matthieu se raccrochant à l'Ancien Testament.

Nous pouvons nous inspirer de la démarche des mages pour aller vers Jésus-Christ. Leur quête devient un peu notre quête, chacun de nous tentant de se rapprocher du Christ, maladroitement certes, avec parfois des croyances absurdes, enfantines, ou même idolâtres. Certains croient peut-être qu'il n'y a rien à découvrir, d'autres sont tellement sûrs de ce qu'ils croient qu'ils ne savent plus accueillir une réalité nouvelle, jusqu’à se fermer des portes pour comprendre le message de Jésus, message de lumière, de foi et d'espérance pour tous.

Pour rencontrer Jésus, il faut se mettre en marche, avoir une ouverture d'esprit, être prêt à élargir un peu sa vision de l’Église. On peut être aidé par des théologiens qui connaissent bien la Bible. Dans notre récit, les prêtres de Jérusalem savaient parfaitement où était le Christ et le disent volontiers, mais eux-mêmes n'y vont pas ! Ainsi, certains peuvent être détenteurs d'une parole parfaitement juste, aider à trouver le Christ, indiquer le chemin... mais sans être pour autant des exemples !
Et de même que les théologiens juifs ont cité de manière erronée une phrase du prophète, en affirmant que Bethléem était une grande ville (alors que le verset initial évoque un petit bourg), de même nos erreurs peuvent être porteuses de sens, et nous conduire malgré tout au bon endroit.

Lorsqu'ils arrivent devant la crèche, l’étoile s’arrête. Ils n’ont plus besoin d’étoile ou d’astrologie dès qu’ils ont trouvé le Christ : l’étoile s’arrête, comme on « arrête la télé », ou qu’on « arrête de fumer ».

Bien sûr, cette étoile illustre aussi le message de Jésus : une étoile dans la nuit prouve qu'il y a de la lumière et nous évite de fixer notre regard uniquement sur le côté « sombre » de nos vies ! Et l'on pense volontiers à Vénus, cette « étoile du matin » (ou du berger), plusieurs fois citée dans la Bible, la plus brillante étoile qui apparaît dans le ciel juste avant l'aube, annonçant l'arrivée de la pleine lumière.

Les mages rentreront ensuite chez eux par un autre chemin (autre que celui de l'astrologie), transformés par leur rencontre avec Jésus, ce bébé signe d'une grande joie, d'une grande force de vie, et Jésus aura la vie sauve grâce à leur désobéissance, leur insoumission à Hérode.

… et nous montrent le chemin de l’offrande de nos vies !

En découvrant Jésus, les mages ne demandent rien, mais ils offrent des cadeaux, ce qu’ils ont de plus précieux. Pour beaucoup de gens, le premier réflexe par rapport à Dieu, c’est de lui demander des choses, comme si Dieu était un distributeur automatique. La prière, c'est sans doute d’abord aller à la rencontre de Dieu, c’est rechercher la présence du Christ, c'est se demander ce qu'on pourrait faire pour Dieu, ou pour les autres (aimer Dieu et son prochain). Avec l'aide de Dieu, nous pouvons faire de grandes choses !

Les mages offrent trois cadeaux, symboles de ce que nous pouvons offrir à Dieu (ou aux autres).

L’or représente la richesse matérielle : on donne à Dieu (par exemple par l’Église) pour mettre sa richesse au service de l’Évangile du Christ. L’encens, cette résine aromatique, est ce qui monte dans l’air, vers le Ciel : c’est une image de la prière dans la Bible (« Ma prière monte devant toi comme l’encens », Ps.141:2), on offre à Dieu notre prière, notre adoration, notre reconnaissance, notre joie... comme une bonne odeur qui monte vers lui. La myrrhe servait à embaumer le corps des morts (comme pour les momies égyptiennes). Nicodème avait préparé avec de la myrrhe le corps du Christ qui ressuscitera (Jean 19:39). On peut ainsi offrir toute notre vie jusqu’à la mort, au moins participer au corps du Christ : en offrant une partie de notre vie, un peu de soi, de son temps, on s’offre soi-même pour Dieu, pour une cause, pour aider les autres.

Souvent, on représente ces mages par un noir, un jaune, un blanc : chaque mage nous représente, dans notre diversité, dans nos faiblesses, notre quête, dans notre difficile démarche pour découvrir le Christ et lui offrir ce que nous pouvons de notre vie, un peu de chacun des trois cadeaux-symboles. Que nous soyons très fidèles, ou un peu moins, de passage comme les mages, collés au Christ comme les apôtres, chacun est invité à faire un bout de chemin vers le Christ, à vivre l’Évangile, à revisiter sa propre vie, pour «s’en retourner» différemment. Chaque « passant » est bienvenu, quelle que soit sa route !

Louis Pernot – Muriel Bernhardt