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La grâce de Noël

par Louis Pernot (décembre 01)

La grâce de Noël

Noël est la fête de la grâce, la fête du don gratuit.

Même pour le monde profane, il l'est resté : c'est un moment où l'on donne des cadeaux. Or le propre du cadeau, c'est que ce n'est pas un salaire, c'est une preuve d'amour...

Noël est devenu une fête de la famille, et peut-être que la famille est l'un des derniers bastions de l'amour dans ce monde, et c'est déjà ça : même si ce n'était qu'une fête profane, il serait terrible que Noël ne puisse plus être fêté nulle part : plus d'amour, plus de don dans ce monde dur et matérialiste. C'est donc une fête de l'espérance : lumière dans la nuit, un peu de joie au moment où l'on déprime parce qu'il fait toujours nuit et mauvais temps, et angoisse d'une nouvelle année avec le temps qui passe.

La foi chrétienne n'est pas là pour nous retirer du monde il n'y a donc pas forcément à être contre la fête païenne de Noël, mais il ne faut pas s'arrêter là. Il faut chercher l'autre dimension spirituelle qui dépasse la dimension matérielle et qui peut lui donner un sens. Aller plus loin.

Là, ce n'est pas très compliqué. Certes on peut se réjouir que Jésus soit venu dans le monde pour nous dire l'amour de Dieu, pour nous aimer même et nous donner son message... mais il y a autre chose.

Noël c'est la fête de la grâce, ainsi que le montre l'acclamation de Noël : "Un fils nous est né, un sauveur nous est donné..."

Là est la première grâce : le salut nous est donné, sans condition, comme un choix unilatéral de Dieu ou de l'amour de Dieu. Le salut n'est pas montré comme un but à atteindre, mais comme un présent. Le salut nous est donné, gratuitement, sans condition. Jésus est né, pas seulement pour les justes, mais aussi pour les pécheurs, il est venu pour sauver tout le peuple de son péché, et pas seulement ceux qui se repentent... Il serait bon que tous les chrétiens méditent cela : le salut est premier, sinon, la venue du Christ aura été vaine. C'est un salut offert par le seul choix de Dieu.

Et de quoi Jésus nous sauve-t-il ?

Autrefois, on disait de l'enfer, de la perdition... aujourd'hui, on dirait, qu'il nous sauve de l'absurde, du désespoir, de l'agitation, du sentiment de culpabilité, de la répétition, de la tristesse, de la mort, ou tout au moins de la peur de la mort. Il donne un sens à notre vie, une raison d'être, il nous sauve de toute nécessité de nous justifier, de justifier notre existence sur terre, de justifier notre bonheur. Il nous dit que nous sommes acceptés, agréés par Dieu (Cf. le Gloria des anges : "paix sur la terre envers les hommes qu'il agrée"). Nous sommes agréés, acceptés, aimés, c'est un préalable.

Voilà une image de la grâce.

Nous n'avons pas à payer, à prouver, à gagner, c'est Dieu qui est venu à nous.

Et puis la grâce, c'est encore plus que cela, parce que certes, c'est que nous pouvons profiter de trésors sans les avoir payés, ou gagnés, mais plus encore, sans que nous n'ayons jamais à les payer.

Il y a en effet le risque dans notre société de libre-service de ne pas avoir une notion complète de la grâce en disant, certes, tous les dons de Dieu nous sont offerts... mais il faudra les payer un jour. Et bien justement, là aussi, le message de la Grâce est essentiel : il ne nous sera jamais demandé le prix de ce que nous avons reçu.

Sur cette terre, il est bien connu que toute joie doit un jour se payer, soit avant, soit, le plus souvent après. La joie du mariage sera payée un jour par la tristesse du veuvage, la joie du travail par la peine de la retraite, le plaisir de la santé, par la maladie. Nous pouvons avoir l'impression en fait que rien de ce que nous possédons de bon sur cette terre n'est vraiment à nous, tout se paye et parfois fort cher, parfois beaucoup plus cher que le vrai avantage que nous avons pu avoir.

Certains qui sont philosophes arrivent à s'y faire, et d'autres peuvent être angoissés par cela, et même finalement désirer ne plus jouir de la vie pour échapper à la peine qui s'en suivrait.

Or en Dieu, justement, ce n'est pas comme cela, on est vraiment dans la grâce : aujourd'hui, vous trouvez une douceur profonde en Dieu, aujourd'hui, vous avez une vraie consolation en sa présence, aujourd'hui vous sentez que Dieu vous aime... et bien soyez en paix, ce bonheur, personne ne peut vous le prendre, et personne ne vous le fera jamais payer, il est gratuit, et à vous vraiment, gratuitement, sans condition, ni avant, ni après.

Ce n'est pas un cadeau empoisonné pour remettre sur vous un poids de devoirs. C'est un vrai cadeau gratuit, totalement gratuit.

"Je vous donne ma paix, je vous laisse la paix, ne craignez point, je ne donne pas comme le monde donne..." dit Jésus... Oui, parce que le monde, lui, il ne donne jamais vraiment, mais Dieu si.

Réjouissez-vous donc, Jésus est né, pour vous, pour chacun de vous, pour vous donner du bonheur, pour vous donner toutes les richesses du ciel de la vie, de la joie et de la paix, nul n'est exclu de ce don, tous sont acceptés, et vous êtes aussi conviés à venir vous réjouir.

Jésus vous est donné. Dieu a fait le plus dur dirions-nous, il ne nous reste plus qu'une chose, savoir reconnaître le don de Dieu, savoir le mettre en nous, savoir nous en réjouir, et en faire le fondement de notre être, la base de toute notre vie. Ne craignez rien, vraiment c'est la plus belle chose, le plus grand bonheur qui puisse être, c'est vraiment le plus grand amour qui existe, c'est l'amour éternel et gratuit.
  

Louis Pernot