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Sauve-moi de la corne de la licorne !

Comment Dieu nous sauvera-t-il, et de quoi ?

Prédication prononcée le 7 février 2021, au temple de l'Étoile à Paris,
par le pasteur Louis Pernot

« Salut », voilà un mot courant, il signifie aujourd’hui au plus « bonjour », et n’a plus beaucoup de sens. Pourtant, il s’agit d’un mot religieux de la plus grande importance. On parle du salut par la grâce, ou par les œuvres, on s’est battus pour ça. Mais aujourd’hui, qui se préoccupe de son salut ? Et que veut-dire « être sauvé », ou que « Jésus nous sauve » ? On est en pleine langue de bois théologique.

Il y a donc un travail à faire : il faut réadapter le langage religieux. Ce qui faisait sens à une époque ne le fait pas nécessairement à une autre. La Réforme s’est construite sur la question du salut : Luther angoissé par son salut s’était fait moine pour tenter de le gagner par ses sacrifices et sa mortification. Il découvre qu’il n’a pas à « faire son salut », mais que nous sommes sauvés par grâce. Cela bouleverse sa vie, ébranle l’Eglise catholique, et embrase toute l’Europe d’une foi nouvelle. Mais aujourd’hui, cette question intéresse-t-elle qui que ce soit hors des théologiens ?

Et dans les bons livres qui parlent du protestantisme, on explique que le fondement de la foi protestante sont les sola gratia et sola fide : le salut par la grâce seule ou par la foi seule... très bien, mais c’est du langage archéologique, ça a peu de chance de rencontrer vraiment les préoccupations de nos contemporains. Qui aujourd’hui a peur de l’enfer ? La préoccupation de son salut éternel est-elle une composante de l’esprit d’aujourd’hui ? Certainement pas ! Alors il faut tout repenser ! Sinon, notre prédication ne fera que prétendre répondre à des questions que plus personne ne se pose.

Que signifie donc pour aujourd’hui « être sauvé » ? Et de quoi nous sauve Jésus Christ, notre « sauveur » ?

En bon protestant, je reprendrai la question à partir de ce que dit la Bible. On trouve, en particulier, dans le Psaume 22 la réponse : le psalmiste dit en effet à Dieu : « Délivre mon âme de l’épée, mon unique de la main du chien. Sauve-moi : de la bouche du lion, des cornes des licornes ». Cela ne semble pas plus simple... Dieu nous sauve de la corne de la licorne ! Il va falloir travailler un peu pour comprendre.

Mais reprenons depuis le début donc.

1.

Que signifie « sauver ? Dans son sens premier, c’est sauver de la mort ! C’est ce que l’on trouve bien dans notre psaume : « Sauve moi de la bouche du lion! », le lion, c’est celui qui peut me tuer. Jésus nous sauve-t-il ainsi de la mort ? Non, pas au sens premier, il ne nous empêchera pas de mourir un jour. D’ailleurs la mort physique est un bien, elle fait partie du cycle de la vie. On naît, vit, meurt et laisse la place à d’autres, c’est très bien comme ça. Et il est même bon de le savoir : cela relativise notre petite personne : nous ne sommes pas Dieu, pas immortels, pas des chefs-d’œuvre qui devraient demeurer éternellement sur cette terre. Savoir cela permet précisément d’éviter le péché originel qui consisterait à se prendre pour Dieu, pour de l’ultimement important. Or non justement, chacun de nous est limité, et donc ne pourra se sauver lui-même. Et personne de notre entourage non plus n’est éternel, nous sommes tous étrangers et voyageurs sur cette terre, nous ne pouvons donc attendre de qui que ce soit d’humain autour de nous d’être la source de toute notre vie. Nous sommes tous des ombres qui passent, qui font trois petits tours et puis s’en vont. Pendant ce temps, nous pouvons apporter notre petite contribution au monde, autour de nous, en sourire, en bonheur, en amour... et laisser les autres continuer à notre place.

Mais si Dieu ne nous sauve pas de la mort physique, il nous sauve tout de même de la mort, d’une autre manière, en donnant à notre existence une dimension invisible, une profondeur qui est le spirituel et que la mort n’atteint pas. C’est cela le message de la résurrection : l’homme n’est pas condamné à la mort mais il est promis à la vie ! Et Dieu nous sauve parce qu’en lui, par le message du Christ, nous avons accès à la vie éternelle. Cette dimension de notre vie qui est au-delà du physique, au-delà de la dimension purement animale de notre être. Parce que justement, nous sommes plus que notre corps, plus que nos fonctions biologiques qui s’arrêtent lors de la mort. Il y a quelque chose en nous qui transcende le matériel, qui est au-delà du physique, et qui se rit de la mort. Jésus nous indique cette dimension, nous invite à y prendre garde, à nous y attacher. Il nous montre le chemin de la vie Éternelle, c’est le sens de son évangile : « celui qui croit en moi vivra quand même il serait mort » (Jean 11 :25).

Mais comment cet évangile nous permet-il de trouver cette dimension éternelle dans laquelle nous sommes sauvés ? Justement en grande partie en nous incitant à prendre conscience du premier point qui est l’affirmation de notre finitude. Nous pouvons trouver le salut qui et en Dieu si nous renonçons à le chercher en nous-mêmes, qu’en apprenant à nous dé-préoccuper de notre vie physique. Cela peut sembler un paradoxe, mais c’est précisément quand on renonce à chercher pour soi le salut qu’on peut le trouver : « qui veut sauver sa vie la perdra, et qui perdra sa vie à cause de moi la trouvera ». (Mat. 16:25). En effet, Dieu nous sauve de la mort physique, non pas en niant celle-ci, mais en nous offrant de sortir « par le haut » d’une autre manière. Quand on sait que le physique n’est que passager, on peut chercher autre chose : « L’homme, est poussière, et tout son éclat est comme la fleur des champs, l’herbe sèche et la fleur se fane... » (Ps. 103:15). Mais la parole de Dieu qui est une parole d’amour demeure éternellement.

Quand on sait cela, on peut trouver ce salut de Dieu, et nous sommes sauvés non seulement de la mort, mais aussi de la peur de la mort !

2a.

Cependant ce n’est pas tellement dans ces termes là que la Bible utilise le mot « sauver ». Ce dont il est question, en particulier dans l’Evangile, c’est ce que l’on lit en Matthieu 1:21. Lors de la naissance de Jésus, il est dit qu’il s’appellera ainsi parce que son nom « Ieshua » signifie « salut » : « elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».

Donc pour l’Evangile, si Jésus est sauveur, c’est pour nous sauver du péché. A première vue, cela ne semble pas vraiment pouvoir parler à nos contemporains. A-t-on peur d’une punition divine... de l’enfer ? Non, sans doute pas. Mais s’il est quelque chose qui reste absolument vrai et qui nous menace tous, c’est le sentiment de culpabilité.

Le sentiment de culpabilité est universel, et moi, je l’expérimente sans cesse : j’ai eu tort, j’ai mal fait. Et cela pourrit la vie. Et pollue les relations avec les autres. D’abord c’est humiliant pour soi, ça rabaisse, et donne à se croire impossible d’être aimé. Et puis quand on culpabilise l’autre, on le réduit à ses erreurs. Humilier l’autre, ce n’est pas l’aimer, mais le rabaisser, l’écraser. Quand le sentiment de culpabilité circule, l’amour est en danger et devient, à la limite, impossible. Et celui qui se sent coupable, qui se sent abaissé, s’il n’arrive pas à se relever risque de vouloir rabaisser l’autre pour avoir l’impression de se relever. C’est pourquoi souvent, celui qui se sent coupable est destructeur pour lui-même, et en plus pénible pour les autres. En général, il ne demande pas pardon, mais va immédiatement tenter de culpabiliser les autres. La culpabilité est vraiment un poison terrible et le pire ennemi des relations harmonieuses auxquelles nous aspirons.

Or précisément, et c’est bien vrai, Jésus nous sauve de la culpabilité. L’Evangile nous le dit de mille manières : vivez pardonnés, vivez sous la grâce ! Le pardon est un des mots centraux de la prédication du Christ, et il est vrai qu’on ne peut vivre en paix avec soi-même et avec les autres, d’une manière constructive qu’en se libérant de tout sentiment de culpabilité, ou de celui d’être redevable sans cesse, de devoir à Dieu, aux autres, au monde entier... ou que les autres nous devraient ceci ou cela. Ce n’est pas pour rien que le pardon, pour soi et pour les autres se trouve dans la demande du Notre Père : «pardonne-nous nos offenses », ou plutôt littéralement : « remets nous ce que nous devons », et « que nous pardonnions aussi aux autres, que nous remettions aussi aux autres ce qu’ils nous doivent ». C’est central, fondateur, incontournable... Même si ce n’est pas facile, et si c’est dans la prière de notre Seigneur, c’est bien que pour cela nous avons besoin absolument de l’aide de Dieu.

2b.

Et puis le péché, ce péché dont Jésus nous sauve, ce n’est pas seulement la culpabilité ou la faute, il peut être vu aussi comme l’imperfection. Ce peut être une manière de comprendre le péché originel : toute la création est frappée de cette espèce d’imperfection fondamentale et d’origine à laquelle on ne peut échapper. Rien n’est parfait dans ce monde, et même les plus beaux objets, les plus neufs, les plus aboutis... ont toujours quelque part un petit défaut, une imperfection, quelque chose qui ne va pas... C’est agaçant, mais c’est comme ça. Et les personnes les plus admirables que nous connaissons, celles qui semblent les plus exemplaires, ne sont jamais sans faiblesse, sans quelque part une tare, une faille... C’est le péché originel ! Rien ici-bas, ni personne n’est parfait et ne peut prétendre être comme Dieu.

Nous l’expérimentons aussi en nous-mêmes. Nous aimerions notre vie parfaite, mais non, en nous, dans notre corps, dans ce que nous faisons, il se trouve plein d’imperfections. Peut-être que l’expérience la plus universelle est ainsi celle de l’échec : j’ai raté... je n’ai pas fait ce que j’aurais dû, ou ce que j’espérais. C’est bien dans ce sens que le mot « péché » est parfois utilisé en hébreu dans la Bible pour dire : « manquer le but, rater la cible ». (Juges 20 :16).

Et quelle est la réponse de l’Evangile à cette expérience douloureuse ? Comment le Christ nous libère-t-il de cette imperfection congénitale ? Paradoxalement, et là encore, non pas en essayant de nous mentir. En gros il nous dit : « mais oui tu es imparfait, il y a dans ta vie de l’échec... et alors ? Tout le monde est comme ça ! Tu n’as donc pas à t’en culpabiliser ! » C’est la merveilleuse réponse de Jésus à la femme adultère, écrasée par sa faute, et condamnée par les autres : « que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre » (Jean 8:7)... Tu vois ! Les autres ne sont pas parfaits non plus, personne n’est parfait, rien n’est parfait... Alors zou debout et avance.

Paul fait de même quand il nous dit dans sa lettre aux Romains : « il n’y a pas un juste, pas même un seul, tous ont péché... » (Rom 3 :10)... Donc tu es pécheur. Oui, Comme tout le monde. Ne te fais pas d’illusion sur ceux qui prétendent à être le contraire, souvent ce sont les pires crapules. Car ils ajoutent à leur imperfection le péché de dissimulation et d’hypocrisie ! Vous êtes pécheurs ! Vous n’êtes pas parfaits ! Voilà.

Mais, bonne nouvelle : Dieu veut bien de vous quand même ! Vous n’êtes pas rejetés pour autant, vous avez le droit de vivre, droit d’être dans le monde, droit d’agir, droit de parler, droit d’être aimés. C’est ça le salut par la grâce et pas par les œuvres, votre droit d’être, tout simplement dans le monde n’est pas conditionné à vos propres mérites, mais vous est offert a priori, et par avance. On ne vous demande pas d’arriver à une sorte de perfection sur laquelle vous seriez jugés, sinon d’ailleurs personne ne serait sauvé. Ce n’est donc pas en soi-même qu’il faut chercher le salut, ou le droit de vivre, puisque personne ne le mériterait alors, mais il faut juste le recevoir. « Dieu a enfermé tout le monde dans la culpabilité pour faire grâce à tous ! » (Rom 11 :32). Dieu, lui vous trouve à son goût. Il vous donne le droit d’exister. Comme Jésus qui conclut ses paroles à la femme adultère après avoir montré que personne n’était parfait de toute façon, par : « moi non plus je ne te condamne pas... Va » (Jean 8:11).

Dieu nous libère ainsi de la honte : si je suis ainsi aimé, considéré, alors je suis donc quelqu’un ! Je peux relever la tête... « L’Eternel m’élève sur le roc, maintenant je relève la tête devant mes ennemis » (Ps. 27:5-6). Je peux donc vivre libéré, heureux et joyeux. Je peux m’assumer avec tranquillité... et libérer toutes mes forces pour agir aussi bien que je le pourrai dans ce monde et collaborer à l’œuvre de Dieu dans le service pour la fraternité, l’amour et la paix.

3.

Après c’est encore le Psaume 22 qui nous permet de préciser les choses : « Délivre de l’épée mon âme, de la main du chien mon unique. Sauve-moi de la bouche du lion, et des cornes des buffles. ». Que Dieu puisse délivrer mon âme de l’épée c’est formidable. Certes, l’épée c’est la mort et nous l’avons vu, mais ce peut être aussi simplement la blessure.

Il y a en effet tant d’épreuves dans la vie ! Certes les blessures d’amour propre sont dures, la culpabilité aussi. Mais il n’y a pas que ça, il y a aussi dans toute vie, deuils, trahisons, violences, agressions physiques, ou psychologiques... Sans cesse nous sommes malmenés par l’existence, par le cours du monde, par les autres. Dieu ne nous évite pas cela... Mais il nous en libère.

D’abord parce que dans toutes ces situations, nous ne sommes pas seuls ! C’est la promesse du Psaume 23 : « quand je marche dans la vallée de l’ombre-mort, je ne suis pas seul, mais tu es avec moi » (Ps 23:4). Le psalmiste ne fait pas croire que Dieu nous sauverait de l’épreuve en faisant en sorte par quelque intervention magique que nous en soyons épargnés, mais que jamais dans l’épreuve nous ne soyons abandonnés sans son secours. J’ai en Dieu une présence, une intimité d’amour. J’ai un ami le plus véritable et le plus sûr qui soit : quelqu’un qui ne me trahit jamais ; qui lui me comprend. En Christ, j’ai un Dieu qui me donne le seul amour qui ne puisse jamais me blesser ni m’abandonner ! En Dieu je me réfugie à l’ombre de ses ailes. Et ce n’est pas seulement une sorte de refuge psychologique, c’est aussi qu’auprès de lui se trouve une source de force, de résurrection et de vie qui vient de lui. Paul encore exprime cela magnifiquement dans sa lettre aux Romains : « qui nous séparera de l’amour de Christ ? La tribulation, ou l’angoisse, ou la persécution, ou la faim, ou le dénuement, ou le péril, ou l’épée ? [...] Mais dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. Car je suis persuadé que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les dominations, ni le présent, ni l’avenir, ni les puissances, ni les êtres d’en-haut, ni ceux d’en-bas, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu en Christ-Jésus notre Seigneur » (Rom 8:35ss).

4.

Et, si nous continuons le Psaume 22, le priant demande à Dieu : « et délivre ma personne des pattes du chien » . Mais là les traducteurs sont embarrassés : ce qui est traduit en général par « ma personne » recouvre un mot qui ne veut pas dire cela et qui peut sembler incongru ici : c’est « mon unique », « mon unicité ». Cela semble ne rien vouloir dire, mais il ne faut pas chercher dans la Bible un sens littéral forcément cohérent. Il n’est pas question ici des moyens matériels de se prémunir des vrais chiens. (De même, quand l’Apocalypse dit qu’il faut laver sa tunique dans le sang pour la rendre plus blanche, ce n’est pas une recette pour ménagères).

Mais donc il faut comprendre que Dieu peut, là, sauver notre unité. Nous sauver de la dispersion, de l’éclatement. Dieu nous rassemble, nous recueille, alors que tout ce qui nous arrive tend à nous mettre en morceaux, à nous désagréger, à faire éclater notre cohérence. En cela Dieu s’oppose au Diable, le mot « diable » venant en grec de « dia-ballein » signifiant éparpiller, jeter aux quatre coins... La foi nous sauve de l’éclatement, parce qu’elle nous donne un sens, un ancrage. Elle nous sauve de l’absurde.

Ce sentiment de l’absurde que l’on peut avoir devant la vie et tout ce à quoi elle est soumise mène un certain nombre de personnes à la foi. La lecture des Frères Karamazov, ou d’En attendant Godot en a converti plus d’un au christianisme. Parce que précisément, l’Évangile donne une réponse à cette question d’une vie qui semble être vaine, n’aller nulle part, et nous faire ressembler à quelque pantin désarticulé par les événements que nous devons subir. Le message du Christ donne un sens, une mission, quelque chose à faire, une raison d’exister, quand bien même notre propre vie nous semblerait de peu d’intérêt : quoi qu’il arrive, j’ai quelque chose à faire. Des gens à aider, à aimer, à accompagner, à servir, j’ai à donner du courage de l’espoir, du bonheur... Cette prise de conscience que je peux avoir une mission me sauve de beaucoup de choses : je sais où je vais, pourquoi je vais, pourquoi je vis, pourquoi je souffre, pourquoi je travaille, pourquoi j’endure...

C’est ainsi que j’ai prêché il y a 30 ans presque exactement, le jour de ma consécration comme pasteur au service de l’Évangile, sur le verset qui me semblait alors pour moi central, reprenant à mon compte cette belle affirmation de Paul : « je sais en qui j’ai cru ». (2Tim 1:12). J’ai dans la prédication du Christ une certitude, une conviction qui donne sens à ma vie, elle me tranquillise, je ne suis plus éparpillé par les diverses craintes de l’avenir, par des désirs exaltés et incontrôlés. Ma vie a un sens. Merci Seigneur !

5.

Et enfin, et peut-être le plus important : notre psaume nous dit enfin que Dieu nous sauve... « de la corne de la licorne ». La corne, nous savons ce que c’est en hébreu, c’est la puissance, la force. Souvent, nos traducteurs mettent « sauve moi des cornes des buffles » pourquoi pas, de toute façon, on ne sait pas quel animal est sous le mot utilisé là. Et le buffle, a sans doute été choisi parce que c’est un animal fort. Et en effet, je demande à Dieu qu’il me sauve de de toute puissance physique... de la brutalité qui règne dans ce monde, de la haine qui s’exprime et me déstabilise. Et je comprends comment Dieu m’en sauve, une fois encore, c’est n’est pas en s’opposant, mais en dépassant. Dieu n’est pas une force physique ajoutant violence à la violence, mais une force spirituelle. Parce qu’en lui j’ai une puissance qui n’est pas physique, mais qui est plus forte que tout. Devant l’amour qui est en Dieu, la haine, la violence, l’injustice, la brutalité sont réduits à l’absurde et au néant : « si l’Eternel est pour moi, que pourrait contre moi un humain ? » dit le Psaume 118 (v.:6).

Mais les traducteurs antiques de la Septante grecque ont traduit l’animal en question par « licorne », ce qu’a conservé le Vulgate. C’est plus intéressant que le buffle parce qu’il y a là une part de mystère ! Les cornes des licornes, dont Dieu peut me libérer, ce sont de toutes ces puissances morbides et néfastes que je ne maîtrise pas trop, que je ne comprends même pas vraiment. Oh Dieu, libère-moi de toutes ces forces de destruction qui m’assaillent... - lesquelles? Je ne sais pas, toutes, même celles que je ne maîtrise pas, que je ne comprends pas, les plus archaïques, les plus mystérieuses et enfouies.

Ou plutôt, on peut comprendre la licorne comme se définissant par sa seule corne. C’est la puissance qui se définit par sa puissance seule qui est mise au centre et qui n’est que puissance. Le vrai danger dont Dieu me délivre, c’est de me croire tout-puissant ! Ou simplement de vouloir mettre ma puissance au centre de ma vie.

Et voilà le secret de tout : ce n’est pas par ma propre force, ni par mes œuvres, ni ma perfection, ni mes propres forces que je me sauverai. Mais en accueillant une force qui vient d’ailleurs et qui vient de Dieu. C’est ainsi que sans renier mon premier verset chéri j’ai découvert celui par lequel je vis aujourd’hui : Paul qui dans l’épreuve entend ce que Dieu lui dit pour le sauver : « ma grâce te suffit car ma puissance s’accomplit dans ta faiblesse » (IICor. 12:9). C’est cela la voie par excellence, la seule qui me sauve : l’humilité, la simplicité. Ce qui nous perd, c’est l’orgueil. La prétention, prétention à être supérieur aux autres, à être des merveilles du monde, à croire que ce serait par nos efforts, nos qualités, nos progrès, nos réussites que nous pourrions nous sauver. Mais non, le salut ne se trouve que dans l’humilité dans le chemin du Christ : « Ayez les pensées comme Jésus qui n’a pas voulu se prévaloir d’être égal avec Dieu, mais s’est humilité prenant la condition de serviteur » (Phil. 2:5ss).

La vie, elle se reçoit. Le salut se reçoit. Tout est grâce, tout est don. Rien n’est dû pour nous. Et quand on sait donner, on est riche de tout. Quand on donne sa vie, on hérite de la vie. « Vous êtes sauvés par grâce, frères et soeurs, cela ne vient pas de vous, mais c’est le don de Dieu » (Eph 2 :8). Sauvés de la mort, sauvés de la peur, sauvés de la culpabilité, sauvés de l’échec, de la solitude, sauvés de la violence, sauvés du rien, sauvé même des licornes, de tout...

Dieu vous donne la vie, par grâce. Vivez heureux, par grâce et pour la grâce.

Louis Pernot

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Psaume 22

Au chef de chœur. Sur « Biche de l’aurore ». Psaume de David.

Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m'as-tu abandonné,
Le Salut est loin de moi loin des mots que je rugis.
Mon Dieu, j'appelle tout le jour et tu ne réponds pas
même la nuit je n'ai pas de repos.
Toi, pourtant tu es saint
Toi qui habites les hymnes d'Israël !
C'est en toi que nos pères espéraient ils espéraient et tu les délivrais
Quand ils criaient vers toi, ils échappaient en toi ils espéraient et n'étaient pas déçus
Et moi, je suis un ver, pas un homme raillé par les gens, rejeté par le peuple
Tous ceux qui me voient me bafouent ils ricanent et hochent la tête
« Il comptait sur l'Éternel : qu'il le délivre ! Qu'il le sauve puisqu'il est son ami ! »
C'est toi qui m'a tiré du ventre de ma mère qui m'a mis en sûreté entre ses bras
A toi je fus confié dès ma naissance dès le ventre de ma mère tu es mon Dieu !
Ne sois pas loin : l'angoisse est proche je n'ai personne pour m'aider
Des fauves nombreux me cernent des taureaux de Basan m'encerclent
Des lions qui déchirent et rugissent ouvrent leur gueule contre moi
Je suis comme l'eau qui se répand tous mes membres se disloquent
Mon cœur est comme la cire il fond au milieu de mes entrailles
Ma vigueur a séché comme l'argile ma langue colle à mon palais
Tu me mènes à la poussière de la mort !
Oui des chiens me cernent une bande de vauriens m'entoure
Ils me percent les mains et les pieds je peux compter tous mes os
Ces gens me voient, ils me regardent
Ils partagent entre eux mes habits et tirent au sort mon vêtement
Mais toi Seigneur, ne sois pas loin ! ô ma force, viens à mon aide !
Préserve ma vie de l'épée arrache-moi aux griffes du chien
sauve-moi de la gueule du lion et de la corne du buffle !
Tu m'a répondu !
+
Et je proclame ton nom devant mes frères je te loue en pleine assemblée !
Vous qui le craignez, louez l'Éternel ! Glorifiez-le vous tous, descendants de Jacob !
Vous tous, redoutez-le descendants d'Israël ! Car il n'a pas rejeté
Il n'a pas réprouvé le malheureux dans sa misère
Il ne s'est pas voilé la face devant lui mais Il entend sa plainte
Tu seras ma louange dans la grande assemblée !
Devant ceux qui te craignent je tiendrai mes promesses
Les pauvres mangeront : ils seront rassasiés ils loueront l'Éternel ceux qui le cherchent
« A vous toujours, la vie et la joie ! »
La terre se souviendra et reviendra vers L'Éternel chaque famille de nations se prosternera devant lui
« Oui à l'Éternel la royauté le pouvoir sur les nations ! »
Tous ceux qui festoyaient s'inclinent promis à la mort, ils plient en sa présence
Et moi, je vis pour lui : ma descendance le servira
On annoncera l'Éternel aux générations à venir On proclamera sa justice au peuple qui va naître
Voilà son oeuvre !

Quel pain quotidien pouvons nous attendre de Dieu?

Ps. 22:21-22