Skip to main content
56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

  Ecouter la version audioConf MP1

Les dix commandements

Prédication prononcée le 8 juillet 2018, au temple de l'Étoile à Paris,

par le pasteur Florence Blondon

Les dix commandements sont certainement un des passages les plus connus de la Bible. Ils sont devenus le texte de loi de référence. Mais s’agit-il vraiment d’une loi ?

Une loi sur le ton de la conversation
Il est étonnant qu’un texte de loi se dise en « je » et en « tu », de manière singulière, comme une conversation. Nos codes de loi ne sont jamais rédigés ainsi, comme l’article 16 du code civil : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie. ». Et, avant, même à l’époque de la rédaction des 10 commandements, le code d’Hammourabi se décline à la troisième personne : « Si quelqu'un a accusé quelqu'un d'autre et lui a imputé un meurtre mais ne l'a pas confondu, son accusateur sera mis à mort. » Les codes de loi sont énoncés de manière impersonnelle, or le style des 10 commandements est bien différent. Le paradoxe est que cette loi qui est donnée de manière personnelle, ait pris cette dimension universelle. Les prescriptions sont reprises dans toutes les sociétés, dès qu’elles s’organisent ; ne pas tuer, ne pas voler…qui pourrait s’y opposer ?

 

Une loi qui intervient dans le cadre de la libération
Ensuite ce qui différencie cette loi des autres, c’est le cadre dans lequel elle intervient. Rappelez-vous ce Péplum « Les 10 commandements », il ne se limite pas à cet instant ou Moïse reçoit la loi. Il raconte l’histoire de Moïse, l’histoire des hébreux, l’histoire de la délivrance. Il s’agit bien de cela, le contexte de la libération. Contrairement à nos codes de loi qui se donnent de manière brute, les 10 commandements intervient dans une narration, la sortie du peuple hébreu d’Égypte, comme le rappelle le début du texte : « Je suis l'Éternel, ton Dieu qui t'ai fait sortir du pays d'Égypte, de la maison de servitude. » (Ex 20,2) Cette mise en perspective, nous invite à comprendre la loi non comme une contrainte, mais comme une libération, le moyen de ne pas retomber dans la servitude. Dieu n’est pas un dieu qui veut nous soumettre, mais bien le Dieu libérateur, rompant ainsi avec les images des dieux archaïques que l’on pouvait représenter sous forme humaine ou animale, ces dieux jaloux, dominateurs, querelleurs, sanguinaires, bref ces dieux à l’image de l’homme, de l’animalité de l’humain. Ici le Dieu d’Israël se présente comme celui qui fait alliance avec son peuple, celui qui libère son peuple. Mais cela bien sûr s’accompagne de quelques règles, histoire de ne pas retomber dans l’idolâtrie. D’ailleurs ces interdits qui concernent la relation entre les humains et Dieu ont également une dimension anthropologique.

L’interdit de la représentation
Il est interdit de se faire des images taillées, mais aujourd’hui nous ne sommes plus dans un monde où nous adorons des statues. On peut discerner dans la quête de l’argent ou du pouvoir, une forme de nouvelle idolâtrie, notre nouveau veau d’or. L’interdit porte également sur nos représentations mentales, voire théologiques qui enferment Dieu dans les images que l’on se fait de lui. Il n’est pas nécessaire pour être idolâtre de représenter Dieu sous forme d’image, de statue de de nous prosterner devant, il suffit de ne pas lui reconnaitre son altérité intégrale. Finalement nous sommes dans l’impossibilité de se représenter Dieu, de dire Dieu de manière définitive. Cela nous dit aussi des choses sur l’humain qui est à l’image de Dieu. Nos représentations de Dieu sont en lien avec la société que nous souhaitons construire. L’interdit de se faire des images taillées, définitives est là pour nous protéger de nos désirs de nous prendre pour Dieu. C’est aussi la signification de l’interdit de prononcer son nom en vain. On ne peut justifier notre brutalité nous référant à Dieu. C’est ce que font tous les fondamentalistes, en oubliant de se mettre vraiment à l’écoute, en conversation avec Dieu. On peut aussi s’interroger sur le nombre 10.

Dix commandements ou dix paroles ?
Pourquoi 10 et pas 7 ou 12, nombres qui nous disent la plénitude. Peut-être déjà parce que ce code n’est pas suffisant, il faut le compléter et surtout l’interpréter. D’ailleurs 10 est le chiffre coutumier, mais il est bien difficile d’en compter 10. Les différentes religions, confessions ne les décomptent pas de manière similaire. Pour comprendre le sens de ce chiffre, nous ferons une autre distinction, car nous parlons des 10 commandements, mais en réalité il s’agit des 10 paroles. D’ailleurs, le judaïsme compte la première parole à partir de « Je suis l'Eternel… ». Et ces 10 paroles sont en relation avec le récit de création de Genèse 1, où Dieu prononce 10 paroles, « Dieu dit » revient dix fois, 10 paroles pour passer du chaos à l’harmonie. Elles sont là pour nous protéger de ce retour au chaos initial. Elles nous offrent la possibilité de vivre en harmonie avec Dieu et notre prochain. La loi libère, elle nous permet de vivre en harmonie et pourtant nous avons tant de mal à la mettre en œuvre dans nos vies. Alors Dieu a inscrit sa grâce au cœur même de l’énoncé des 10 paroles.

Un horizon à atteindre, un horizon de promesses.
En effet, comment ne pas entendre que presque la totalité des prescriptions sont énoncées non pas l’impératif, mais au futur. Comme pour nous signifier que certes, nous allons parfois manquer d’y souscrire, nous allons fauter, mais il y a toujours la possibilité d’un recommencement.
Les 10 paroles n’ont donc rien de paroles de soumission, mais sont un don de Dieu, une déclaration d’amour de Dieu pour son peuple, une déclaration d’amour pour moi.

Exode 20

1Alors Dieu prononça toutes ces paroles en disant :
2Je suis l'Éternel, ton Dieu qui t'ai fait sortir du pays d'Égypte, de la maison de servitude.
3Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face.
4Tu ne te feras pas de statue, ni de représentation quelconque de ce qui est en haut dans le ciel, de ce qui est en bas sur la terre, et de ce qui est dans les eaux plus bas que la terre.
5Tu ne te prosterneras pas devant elles, et tu ne leur rendras pas de culte ; car moi, l'Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis la faute des pères sur les fils jusqu'à la troisième et à la quatrième (génération) de ceux qui me haïssent,
6et qui use de bienveillance jusqu'à mille (générations) envers ceux qui m'aiment et qui gardent mes commandements.
7Tu ne prendras pas le nom de l'Éternel, ton Dieu, en vain ; car l'Éternel ne tiendra pas pour innocent celui qui prendra son nom en vain.
8Souviens-toi du jour du sabbat, pour le sanctifier.
9Tu travailleras six jours, et tu feras tout ton ouvrage.
10Mais le septième jour est le sabbat de l'Éternel, ton Dieu : tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni l'étranger qui réside chez toi.
11Car en six jours l'Éternel a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qui s'y trouve, et il s'est reposé le septième jour : c'est pourquoi l'Éternel a béni le jour du sabbat et l'a sanctifié.
12Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent sur la terre que l'Éternel, ton Dieu, te donne.
13Tu ne commettras pas de meurtre.
14Tu ne commettras pas d'adultère.
15Tu ne commettras pas de vol.
16Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain.
17Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain ; tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni rien qui soit à ton prochain.

Ex. 20:1-17