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Le mystère de la joie, Nietzsche avait-il raison ?

Prédication prononcée le 28 juin 2020, au temple de l'Étoile à Paris,
par le pasteur Louis Pernot 

1. Qu’est-ce que la joie ?

La Bible parle souvent de la joie... cette joie dont nous ne savons pas trop d’où elle vient, mais que nous aimons tous. Qu’est-elle exactement ?

D’abord elle n’est pas à confondre avec ses deux cousines que sont le bonheur et le plaisir. Le bonheur, est un état durable et positif, une harmonie avec soi-même. La pensée biblique a la particularité de le voir comme une dynamique de l’existence, en particulier avec les Béatitudes (Matt. 5). Le plaisir, c’est la jouissance de quelque chose à un moment donné... La joie, c’est autre chose. Le philosophe Charles Pépin en parle comme d’un sentiment fugace qui nous étreint parfois. Un état imprévisible qui nous saisit dans certaines circonstances quand tout à coup on se sent joyeux. Cela peut se trouver sans que nécessairement l’on soit dans les moments où nous avons le plus de chance ou le moins de difficulté.

La joie est un état spontané qui peut naître de causes infimes, en tout cas semblant insignifiantes. Ainsi quand on retrouve un objet que l’on avait égaré depuis longtemps et que l’on pensait perdu. La joie nous saisit... Joie évoquée dans l’Évangile par la parabole de la drachme perdue (Luc 15:8-10). L’objet n’a pas forcément une valeur considérable, mais joie... joie de pas grand-chose, et le retrouver rend joyeux ! Ou quand on pense qu’il n’y a plus de dessert dans le frigidaire, on regarde et surprise, il en reste un, le préféré. Joie. Moment de joie intense et simple qui est démesuré par rapport à la cause.

Et parfois la cause semble même inexistante : on se promène en forêt, ou en montagne, et soudainement on ressent le sentiment d’être bien, d’exister, d’être en harmonie avec la nature, de faire qu’un avec le monde qui nous entoure. Sentiment que l’on peut avoir aussi dans le sport quand le corps répond bien et que tout va bien.

Bizarrement, la joie, parfois même, peut surgir dans des situations a priori difficiles, où tout à coup la joie prend le dessus, on ne sait pas pourquoi. La joie n’est donc pas se réjouir que tout aille bien, mais que malgré les problèmes du monde, malgré les difficultés, il y a une sorte d’élan vital qui me pousse à rendre grâces. A adhérer à tout de façon globale, dire « oui » à la vie, oui au monde ; malgré ma douleur, malgré tout ce qui ne va pas dans le monde, je dis « oui » à la vie. C’est cette joie dont parle Nietzsche dans le « Ja sagen » du surhomme : acquiescer au monde (cf Clément Rosset : La force majeure).

Cette joie est curieuse : elle n’a rien à voir avec le plaisir. Le plaisir est d’une autre nature, il y a des plaisirs tristes : celui du buveur, le plaisir de la drogue, ou même le plaisir de la jouissance sexuelle, plaisir intense qui peut ne générer aucune joie, et même au contraire donner de la tristesse, de la culpabilité, ou de l’angoisse. D’où la difficulté de celui qui croit qu’en cherchant les plaisirs il trouvera la joie, ce qui est évidemment faux. On peut augmenter les plaisirs, dépenser, acheter des voitures, des vacances de rêves, cela ne donnera pas la joie.

La joie est d’un autre ordre : c’est un moment d’adéquation avec son être, une adhésion au monde. Tout à coup, on est heureux de vivre. On parle d’ailleurs communément de la « joie de vivre », c’est ça : la joie est joie de vivre. Il y a des moments, parfois fugaces, où l’on est bien parce qu’on adhère. Dans ces moments, pour moi, je ne fais qu’un avec mon corps. Je ne fais qu’un avec ce qui m’arrive. Ce peut-être parce que j’ai une chance, même petite et alors je me dis « ah la vie est belle, chic ». Ou j’adhère au monde tel qu’il est parce qu’il est beau... Je ne sais pas ce qu’il adviendra ; ce qui arrivera peu importe, c’est une adhésion au moment donné.

2. Essayer de comprendre pour essayer de trouver la source de la joie.

La joie donc est adhérer à sa vie, consentir à sa vie, adhérer au monde. Et je crois que l’on peut apprendre à consentir à sa propre vie, et ça a rapport avec l’amour...

L’amour, on le voit d’abord comme amour du prochain, pourquoi pas. Mais le commandement d’amour de l’Évangile va au-delà du prochain... Il faut aimer, tout aimer, tout accueillir avec amour, les bons comme les méchants, le bien comme le mal. Aimer, c’est consentir, accueillir l’autre comme il est, dire « oui » à sa vie, accueillir son être comme il est. Accueillir l’autre comme une grâce, ce qui suppose un degré important de travail intérieur parce que l'autre n'est jamais conforme à ce que j'attends de lui, mais n'est qu'aveuglément, j’accueille l’autre parce que je ne vois que ses qualités. L’amour devient adulte quand je choisis d’aimer même les yeux ouverts ! Et je peux choisir d’adhérer à l’autre, ce n’est pas une question de sympathie ou de sentiment.

Or l’amour est source de beaucoup de joie ! Et chaque fois que je me rebelle me durcis contre l’autre, le bonheur s’éloigne, la joie s’éloigne. Il n’y a de joie que dans l’amour, jamais dans l’aigreur, ou dans la haine.

Et l’amour, c’est consentir à l’autre, mais aussi, c’est aussi consentir à soi-même. D’où l’importance de la double dimension du commandement « tu aimeras ton prochain comme toi-même », il faut aimer son prochain... mais pour cela savoir s’aimer soi-même, et donc consentir à sa propre vie, ce qui n’est pas si facile. J’accueille mon existence, comme elle est, et je décide d’y adhérer, je dis « oui » à la vie. Ainsi peut-on comprendre le célèbre « choisis la vie » du Deutéronome (Deut 30:19). Il ne s’agit pas de dire qu’il y aurait deux portes s’ouvrant devant nous, l’une menant à la mort et l’autre à la vie et qu’il faudrait choisir la bonne, mais de « choisir de vivre » : choisis de dire « oui » à la vie. La vie est ce qu’elle est, je choisis de dire « oui » à la vie, à ma vie et d’y adhérer. Accueillir sa propre vie et apprendre même à l’aimer ! C’est ce à quoi Nietzsche nous invite avec son Ja sagen, disions-nous, dans Le Gai Savoir ou Ainsi parlait Zarathoustra. Le « surhomme », l’humanité supérieure vers laquelle nous devons tendre qui sait dire « oui » à la vie. Et apprendre à aimer toute sa vie à y adhérer, au bien comme au mal, aux moments joyeux comme à ceux qui sont plus difficiles ! C’est le secret de la joie !

Il en est ainsi de la musique que nous aimons. Nous n’aimons pas seulement les musiques joyeuses et dansantes, mais nous pouvons aussi éprouver du plaisir à écouter des musiques lentes, voire tristes ou funèbres. On peut aimer les danses de villages ou la variété, et aussi le requiem de Mozart ou les passions de Bach. Il faut un peu de tout et on peut aimer même des musiques qui nous font pleurer. La beauté de la vie est cet ensemble qui ne tient que si le sujet les considère comme un tout se complétant et formant une harmonie. On ne peut pas écouter de la musique tapageuse tout le temps, ce serait fatigant, on ne peut pas écouter que des odes funèbres ; c’est le tout qui fait la beauté de la vie. Ainsi la vie est belle dans son ensemble avec tout ce qui la compose d’heurs et de malheurs. La naissance est belle et la mort peut être belle aussi. Apprendre à aimer sa vie, c’est vouloir aimer même le mal qui s’y trouve.

La joie ne consiste pas à voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Elle n’est pas optimisme ou résignation, mais un mouvement qui dépasse tout, le verre à moitié plein, le verre à moitié vide, ce n’est plus la question, simplement une joie débordante qui transcende toute chose, qui choisit justement de ne plus calculer si le verre est plus plein que vide ou le contraire, mais à l’accueillir contre toute raison, sans se poser de question. La joie est une sorte de folie par rapport au monde, de déraison qui ne calcule pas les avantages et les inconvénients. Il y a ainsi dans la joie quelque chose d’irrationnel. Ce n’est pas pour rien que l’on dit : « fou de joie », ou que Paul parle d’un débordement de joie alors qu’il est au milieu de toute sorte d’affliction : « Je déborde de joie au milieu de toute notre affliction » (2 Cor 7:4). Paul de même parle de la sagesse de Dieu qui est folie pour les hommes, la foi pouvant être d’adhérer malgré toutes les bonnes raisons que l’on pourrait trouver de ne pas adhérer. (I Cor. 1:20-21, I Cor. 3:18-19. )De même Kierkegaard parlera de la foi comme « un saut qualitatif dans l’absurde ». Il s’agit d’accepter Dieu, d’accepter sa vie, par un acte de volonté, par principe, sans se poser trop de questions : Malgré tout, malgré le mal, malgré le doute, malgré la souffrance, malgré... « je crois » et de dis « oui ». C’est ainsi qu’est la célèbre confession de foi de la communauté des sœurs protestantes de Pomeyrol : « Je crois en Dieu. Malgré son silence et son secret, Je crois qu'Il est vivant. Malgré le mal et la souffrance, je crois qu'Il a fait le monde pour le bonheur de la vie. Malgré les limites de ma raison et les révoltes de mon cœur, je crois en Dieu... ».

Mais ce n’est pas commode, parce que la vie est souvent différente de ce qu’on en attend. Évidemment, on ne peut pas dire oui tout le temps, il y a des choses qui nous blessent, nous font souffrir, mais l’important, c’est d’y adhérer globalement, la perfection n’est jamais de ce monde... C’est un idéal. Une volonté, un a priori, un principe de vie.

3. Quel rapport à ce oui à la vie Nietzschéen avec la foi ?

Mais tout cela relève plutôt de la philosophie pratique. Y a-t-il un rapport avec la foi ? A priori, la foi semble plutôt un obstacle à la joie parce qu’elle est projection, idéalisation : quand je compare le monde avec ce qu’il devrait être ou pourrait être, cela me rend profondément triste, et je ne peux pas y adhérer. Donc la foi risque sans cesse de projeter dans un idéal inatteignable qui m’éloigne de la vie telle qu’elle est. Ainsi la foi nous éloigne de l’animal qui vit sans se poser de questions et sans souci du lendemain. Jésus d’ailleurs dans Matthieu loue cette insouciance de l’oiseau dans son célèbre sermon sur la montagne (Matt. 6 :26), et invite même à vivre comme eux dans une sorte de confiance qui ne se préoccupe pas du lendemain.

• Mais la foi peut être source de bonheur

a. D’abord si on est calvinien : la théologie de Calvin était, contrairement à ce qu’on peut penser, une théologie profondément joyeuse. Elle consistait en effet à dire que tout ce qui arrive est la volonté de Dieu, et par conséquent, je ne peux que dire, quoi qu’il arrive, que « merci Seigneur, oui et ainsi soit-il ». La théologie de Calvin invite à acquiescer sa vie et à aimer sa vie, même ses épreuves au nom d’un principe supérieur qui est la volonté d’un Dieu créateur qui fait tout bien et qui nous aime. Elle est ainsi invitation à renoncer à toute démarche morbide de voir le mal partout et de s’arc-bouter contre lui. Pour Calvin tout est bien et donc même si je ne comprends pas très bien, et que ce qui m’arrive peut sembler mal, je choisis d’y adhérer, j’y consens en faisant confiance à Dieu qui est plus grand que moi et qui n’est que source de bien. Cela peut sembler discutable théologiquement, mais c’est extrêmement puissant d’un point de vue existentiel : le mal ne fait mal que si on le prend mal. Et la souffrance ne vient que de ce qu’on refuse ce qui nous arrive au lieu de l’intégrer pacifiquement. Cela peut sembler aussi un peu naïf, mais c’est une façon de dire que l’on adhère à ce qui arrive au nom d’un principe supérieur. Peut-être même que la foi est justement de croire dans la vie, et de choisir la vie et d’acquiescer. C’est ce qui rend heureux en fait. On trouve cela aujourd’hui encore chez certains théologiens, comme l’exprime ce poème du pasteur Alain Houziaux : Oui, mon frère, ma sœur, quoi qu’il advienne, sois en paix avec Dieu et avec toi-même. Ne l’oublie pas, malgré les vilenies, les tristesses et les déceptions, la vie a toujours du bon. La vie est un cahier dont chaque jour tourne la page. Chaque matin, efforce-toi d’écrire sur la page encore blanche ce simple petit mot : Amen. Amen pour cette journée qui viendra, avec sans doute ses bons moments et aussi ses heures grises. Oui, devant la journée qui vient, dis seulement « Amen et merci pour ce jour ». Et ton consentement ôtera à la journée sa part d’amertume. Oui, mon frère, ma sœur, sois bon avec toi-même, et essaie d’être heureux.

b. Ensuite, j’ai de la joie, parfois donc parce qu’il y a une cause, même infime qui me fait déborder de joie. Je remarque alors que la joie vient généralement d’une rencontre avec un événement, avec la nature avec l’autre... La joie fait sortir de soi-même pour se sentir en relation avec le monde et un autre que soi. En ce sens, il peut y avoir de la joie dans la rencontre avec Dieu. (Pour ceux à qui ça parle, c’est-à-dire qui ont la sensibilité qui correspond). Cela participe à la joie de l’amour de l’autre, quand on éprouve la joie de l’amour de Dieu, de l’amour de la vie, de l’amour du monde. Et l’homme étant un animal profondément relationnel tout ce qui le nourrit dans sa manière d’être en relation le rend joyeux, que ce soit spirituellement avec Dieu, ou par l’appartenance à une communauté, ce qui explique l’importance des paroisses et des églises dans la religion qui ne se contente pas du spirituel, mais nourrit aussi la relation dans la dimension humaine.

C’est ainsi que Dieu revient dans ce mécanisme de la joie. La foi peut éloigner de la joie certes, mais peut être aussi une immense source de joie, parce qu’elle met en relation. La religion, dit-on trouve une de ses étymologies dans le mot « religere » qui signifie « relier ». La religion, c’est ce qui relie, elle permet de relier les autres, et relier à Dieu. Dans la foi, je suis relié à un tout autre qui m’aime et cette relation en elle-même est une source permanente de joie.

4. Origine de la joie

a. Si on se demande d’où vient la joie, on peut d’abord penser à la joie de vivre tout simplement, la joie épicurienne devant la merveille de la vie, ces atomes qui s’organisent comme ça pour donner la vie, c’est une merveille. On peut ainsi être reconnaissant pour la vie, joyeux d’être en vie, de vivre... Certains sont sensibles à cela.
b. Ou bien on peut considérer la joie juste comme un processus biologique interne qui fait que précisément dans les moments de difficulté, il y a un sursaut du corps qui génère cette joie qui est une énergie vitale. Peut-être même par un processus biochimique où le corps déverse de la dopamine ou quelque hormone donnant au cerveau un sentiment de joie. Peu importe en fait, il se trouve que cela existe, et donc autant s’en nourrir et profiter de cette ressource de la nature, de cette drogue gratuite ne faisant aucun mal.

Cette capacité à ressentir la joie pour l’humain, certains biologistes disent même que ce pourrait être comme un instinct de survie qui chez nous, animaux raisonnables, se déguise en joie de vivre. Une sorte d’adaptation au monde qui permet de dépasser le danger de notre raison qui risque à tout moment de nous déprimer ou de nous décourager. L’avenir est toujours angoissant, et par adaptation, la nature a doté l’homme de ce pouvoir de posséder quelque chose qui permet de dépasser l’angoisse de l’avenir, ou la souffrance du présent.

c. Si l’on reste dans ce registre, on peut penser que la joie est souvent dans le rapport au corps. Il y a une joie qui vient du corps, qui est irrationnelle. Et qui nous sort justement peut-être de la raison, source de souffrance. C’est pourquoi les joies du corps sont importantes. Le corps peut produire de la joie quand on apprend à se mettre en harmonie avec lui, qu’on apprend à l’écouter. D’où les pratiques de méditations diverses pour l’homme du XXIe siècle lui apprenant à collaborer avec son corps parce que le corps a des ressources vitales absolument essentielles. Et sans aller jusque-là, il est bon de chercher cet équilibre avec le corps qui est indispensable pour la joie. La joie est indispensable, certainement, pour former une théologie qui puisse dépasser le tragique de l’existence.

d. La foi, quant à elle, peut apporter de la joie si elle est adhésion au monde, au projet créateur, et à l’œuvre de Dieu. Mais pour adhérer au monde, il faut reconnaître qu’on appartient au monde. On ne peut pas adhérer au monde en s’en retirant. Se retirer du monde est une négation du monde, nier le monde et se couper de la joie. La joie n’est jamais de se couper, au contraire, la joie est de l’ordre de l’accueil, de l’ouverture. S’ouvrir à soi-même, s’ouvrir à son corps, à sa vie, et au monde en général.

e. Et enfin, la joie est communion avec le monde mais peut-être plus encore avec la puissance créatrice du monde. Si elle est accueil du monde, elle peut être plus profondément une autre adhésion qui est celle à la puissance créatrice de Dieu. Accueil de quelque chose qui est au-delà du monde. Accueil d’une puissance existentielle, puissance de vie qui traverse le monde et qui existe aussi en moi-même. Nous sommes invités à dire « oui » à Dieu, baisser cette garde contre cette puissance créatrice qui traverse le monde, c’est comme cela qu’on peut être heureux parce qu’on est alors en phase avec ce qui est le plus profond en nous, avec l’énergie qui est la source même de notre être. Ainsi dans la nature, le cheval qui galope fou de joie sur la plage adhère à son être de cheval et persévère dans son être, pour l’humain c’est plus compliqué parce que cela demande notre adhésion intellectuelle et apprendre ainsi à se mettre en phase avec soi-même et à écouter cette puissance vitale qui nous traverse.


5. Joie active

Et enfin, il y a une joie de faire. C’est indéniable. Joie d’aider les autres, de réaliser un projet, d’apprendre, de progresser. Cette joie est d’une autre nature, mais tout aussi essentielle. Habituellement d’ailleurs, on commence par là parce qu’elle est sans doute la plus évidente et la plus facile à mettre en œuvre (même si elle contrarie notre égoïsme ou notre paresse naturels). Mais cette joie n’est pas indépendante de celle que nous avons évoquée. Il y a dans la vie des moments pour recevoir et des moments pour donner. La joie est un transfert d’énergie, on peut la trouver quand on reçoit de l’énergie, mais donner c’est aussi se connecter à la joie. La joie est en effet fondamentalement rapport à l’autre, relation, échange avec le monde et avec l’autre. Et un échange ne peut pas être durablement dans un seul sens.

Que le don soit une véritable source de joie, l’Évangile le dit sans cesse comme dans l’agraphon des Actes : « il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Actes 20:35), ou encore dans l’épisode du lavement des pieds où Jésus conclut son invitation à se faire serviteur des autres par cette affirmation : « si vous savez cela vous êtes heureux pourvu que vous le mettiez en pratique » (Jean 13:17). Mais précisément dans ce passage on voit qu’il ne s’agit pas seulement d’aller concrètement agir pour les autres, mais en premier lieu de recevoir le service. Pierre a du mal à comprendre cela, mais Jésus lui dit : « Si je ne te lave, tu n’as point de part avec moi ». La joie, c’est donc à la fois donner et recevoir. Et peut-être que pour pouvoir vraiment donner il faut d’abord avoir reçu. C’est pourquoi nous n’avons pas voulu commencer par cette joie active qui pourtant est la plus évidente. La joie devient réellement possible quand la communication circule dans les deux sens. Accepter de recevoir accepter la joie n’est pas si simple. Mais c’est quand on sait recevoir des autres et qu’on sait donner que la joie est complète.


La joie est donc totalement irrationnelle, c’est accepter de recevoir quand personne ne vous doit rien ! C’est accepter de donner quand on voudrait plus pour soi, c’est aimer même le mal. Elle est hostile à toute forme de calcul, d’intérêt de prévision. La joie, c’est juste aimer et se laisser aimer ! La joie est une folie de Dieu, parce que je ne suis pas aimable. Et folie pour moi parce qu’il ne m’est pas naturel d’aimer.

La joie, c’est accueillir quelque chose, quelqu’un qui n’est pas de soi, c’est se rendre disponible à la merveille du monde, s’ouvrir aux autres, accueillir l’autre, l’amour de Dieu, sa puissance créatrice. Et baisser la garde, abandonner toute méfiance, tout calcul, tout intérêt pour faire confiance à Dieu et à la venue du Royaume.

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Confession de foi des sœurs de Pomeyrol

Je crois en Dieu.
Malgré son silence et son secret, Je crois qu'Il est vivant.
Malgré le mal et la souffrance, je crois qu'Il a fait le monde pour le bonheur de la vie.
Malgré les limites de ma raison et les révoltes de mon cœur, je crois en Dieu.
Je crois en Jésus Christ.
Malgré les siècles qui me sépare du temps où il est venu, je crois en sa Parole.
Malgré nos incompréhensions et nos refus, je crois en sa résurrection.
Malgré sa faiblesse et sa pauvreté, je crois en son règne.
Je crois en l'Esprit Saint.
Malgré les apparences, je crois qu'il conduit l'Eglise.
Malgré la mort, je crois à la vie éternelle.
Malgré l'ignorance et l'incrédulité je crois que le Royaume de Dieu est promis à tous.
Amen

Jean 13:1-17

1Avant la fête de Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde au Père, Jésus, qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.
2Pendant le repas, alors que le diable avait déjà mis au cœur de Judas, fils de Simon, de le livrer, 3Jésus, qui savait que le Père avait tout remis entre ses mains, qu’il était venu de Dieu et qu’il s’en allait à Dieu, 4se leva de table, ôta ses vêtements et prit un linge dont il s’entoura. 5Ensuite il versa de l’eau dans un bassin et se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture. 6Il vint donc à Simon Pierre, qui lui dit : Toi, Seigneur, tu me laverais les pieds ! 7Jésus lui répondit : Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le comprendras dans la suite. 8Pierre lui dit : Non, jamais tu ne me laveras les pieds. Jésus lui répondit : Si je ne te lave, tu n’as point de part avec moi. 9Simon Pierre lui dit : Seigneur, non seulement les pieds, mais encore les mains et la tête. 10Jésus lui dit : Celui qui s’est baigné n’a pas besoin de se laver [sauf les pieds], mais il est entièrement pur ; et vous êtes purs, mais non pas tous. 11Il connaissait en effet celui qui le livrait ; c’est pourquoi il dit : Vous n’êtes pas tous purs.
12Après leur avoir lavé les pieds et avoir repris ses vêtements, il se remit à table et leur dit : Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? 13Vous m’appelez : le Maître et le Seigneur, et vous dites bien, car je (le) suis. 14Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres ; 15car je vous ai donné un exemple, afin que, vous aussi, vous fassiez comme moi je vous ai fait. 16En vérité, en vérité, je vous le dis, le serviteur n’est pas plus grand que son seigneur, ni l’apôtre plus grand que celui qui l’a envoyé. 17Si vous savez cela, vous êtes heureux, pourvu que vous le mettiez en pratique.

Jean 13:1-17