Bienvenue dans la joie du Royaume de Dieu
Prédication prononcée le 1er juillet 2018, au temple de l'Étoile à Paris,
par le pasteur Louis Pernot
Qu’est-ce que le Royaume des Cieux ?
La parabole des noces en Matthieu 22 dit que le Royaume des Cieux est comme un banquet de noces. Un banquet de noces, on voit à peu près ce que c’est, mais le Royaume des Cieux (ou de Dieu), qu’est-ce donc ?
La mauvaise réponse serait de dire que c’est le lieu d’après la mort. Quand nous disons avec le Notre Père « que ton royaume (ou règne, c’est le même mot) vienne », on ne demande pas à Dieu de nous tuer !
La bonne réponse, on la trouve dans la bouche de Jésus : « le Royaume de Dieu, il est au dedans de vous » (Luc 17:24). Le Royaume de Dieu, c’est donc tout ce qui, en nous est en relation avec Dieu, pour se sentir protégé par lui et pour le servir ; c’est la foi. Ces paraboles du Royaume décrivent donc comment on peut entrer en relation avec Dieu, et ce qu’il advient pour nous quand nous nous trouvons dans la présence de Dieu. Mais on pourrait aussi lire : « Le Royaume de Dieu, il est au milieu de vous », le « vous » est alors pluriel, et on aurait une dimension communautaire du Royaume : vivre fraternellement en communion et en paix les uns avec les autres. Sans doute que ces deux lectures se complètent l’une l’autre.
Notre parabole des noces nous dit alors bien des choses essentielles. La première, c’est qu’être dans la présence de Dieu est une fête et une joie. Cela va contre les tristes intégristes qui veulent toujours terroriser, angoisser et attrister leurs fidèles par des scrupules et des culpabilisations. Non, quand on découvre Dieu et qu’on s’en approche, on trouve une source de joie, de bonheur et d’abondance extraordinaires. L’Evangile est étymologiquement une « bonne nouvelle », certes, vivre l’Evangile n’est pas toujours facile et peut demander des sacrifices, des choix difficiles, des engagements qui peuvent nous coûter, mais globalement, tout cela mène à la joie et la fête. Ce n’est pas pour rien que la prédication du Christ commence par les Béatitudes : neuf fois « heureux ».
Ensuite Dieu invite tout le monde. Il n’y a pas d’examen d’entrée, pas d’autre condition que de bien vouloir venir dans la joie du maître. La présence de Dieu est offerte à tous, il suffit d’accepter d’y aller. Chacun est bienvenu, « méchant ou bon » comme dit la parabole.
Accepter d’être heureux !
Etre croyant, c’est d’abord donc croire dans la joie possible. C’est accepter d’être heureux ! Il faut oublier ses culpabilités et se tourner résolument vers la vie en en recevant avec simplicité toutes ses grâces et ses chances. On dit souvent que la foi aide dans les épreuves, sans doute, mais il ne faut pas la réduire à ça. La foi, c’est aussi être encore plus joyeux dans les bons moments, et trouver une joie encore plus grande que celle que procure le matériel.
Mais on n’a pas toujours de la chance dans la vie, et être heureux ne dépend pas ce qui nous est donné, c’est une démarche de foi, c’est un principe de vie, de choisir tant que possible de voir les choses positivement et de ne pas se laisser assombrir par le mal. Dans la parabole des talents, quand il est dit au serviteur : « entre dans la joie de ton maître », ce n’est pas une licence, ce peut être vu comme un commandement. Pour soi, c’est déjà bien agréable d’être heureux, et d’une certaine manière, ce peut-être comme une sorte de principe : choisir la joie plutôt que la tristesse, choisir de voir le meilleur plutôt que toujours me laisser détruire par le pire. Certes on n’est pas totalement maîtres de ses sentiments, mais néanmoins nous avons une part de liberté et de choix, même dans ce domaine, et on peut au moins faire ce qu’on peut. Et puis vis-à-vis des autres, la joie est un véritable devoir. Il ne faut pas embêter les autres avec ses problèmes, ils en ont eux même suffisemment, et donc le meilleur cadeau que l’on peut faire à son entourage c’est de donner de la joie. Et même dans toutes ses œuvres, ce que l’on fait sans joie perd son sens et le bien que nous ferions cesserait même en partie d’être du bien. Un chrétien triste est un triste sire. Or certes, il se peut qu’il n’y ait pas beaucoup de joie en nous, mais nos paraboles ne nous demandent pas forcément de chercher au fond de nous une joie qui ne s’y trouve pas forcément, mais d’enter dans la joie de son maître. Il y a en Dieu, en Christ une vraie joie, elle est là pour nous et nous pouvons la faire nôtre. La joie du maître est là, offerte, mais il faut y aller pour la trouver, y entrer. Il n’est pas dit : « reste sur place et profite de la joie qui va t’être donnée ». Les invités de la noce également doivent quitter leur activité, leur commerce, leurs affaires pour un temps afin d’aller au banquet.
Cette joie est donc offerte, et elle doit aussi être un idéal de vie. Mais cet idéal ne doit pas culpabiliser celui qui n’y parviendrait pas. Là encore chacun fait ce qu’il peut, le maître n’exclue pas du banquet celui qui resterait triste, mais seulement celui qui n’a pas voulu revêtir l’habit de noces offert. Rajouter un peu de joie spirituelle au dessus de ses habits de deuil est toujours faisable.
Le bonheur ne se trouve pas en cabines individuelles
Et, autre leçon de la parabole, pour bénéficier de la joie offerte, il faut accepter d’entrer en relation avec les autres. Or ce n’est pas évident, on a toujours de bonnes raisons pour penser que les autres sont pénibles. Et la salle de noces de la parabole ne devait pas être avec une population triée sur le volet puisqu’ont été invités « méchants et bons ». Mais voilà, ne pas juger les autres est une clé de l’Evangile, et le bonheur ne se trouve que si on accepte d’entrer en relation avec les autres en général, et avec tous les autres, méchants et bons, quels qu’ils soient, sans juger. Si on reste seul et centré sur ses propres préoccupations, on finit par dépérir tout seul. C’est dur, mais c’est comme ça et la parabole fait sans doute bien de nous le rappeler.
Sans doute qu’une des épreuves les plus terribles de la vie est la solitude. Et là nous voyons qu’il y a une salle pleine de convives prêts à entrer en relation avec nous, pour notre plus grande joie, mais encore faut-il que nous acceptions d’y entrer. Notre parabole est ainsi très claire sur ce point : le remède à la solitude n’est pas d’attendre que les autres viennent vers nous, mais que nous acceptions d’aller vers les autres sans trouver sans arrêt de mauvaises ou bonnes excuses pour ne pas le faire. Ainsi la solitude n’est elle jamais une fatalité, tant qu’on se prend soi-même en main, il y a toujours d’une certaine manière un autre vers lequel je peux aller.
Donc tant qu’on le peut nous devons toujours privilégier le fait d’aller vers les autres. L’humain n’est humain qu’en relation et que s’il donne. La solitude est le pire des poisons, elle déshumanise et nous tue. Or on peut toujours choisir d’aller vers les autres sans tout attendre d’eux. Et même jusque dans sa dernière extrémité, on peut toujours sourire, téléphoner, s’informer, témoigner, donner, écouter, ou prier pour les autres... Le salut est dans la bonne relation que nous avons avec ceux qui sont autour de nous quelle que soit notre situation et quels que soient ceux qui sont dans notre champ de vie. Et cela peut se faire presque jusqu’à sa mort, même à l’hôpital, même à la dernière extrémité, il y a des gens autour de nous, à nous de les voir et que notre relation avec eux soit une relation de fête et de grâce.
Maintenant, il est vrai qu’il peut y avoir certaines personnes qui ne peuvent plus du tout entrer en relation avec les autres, que ce soit par un dysfonctionnement physique ou mental. C’est alors à nous d’aller vers eux et de ne pas les laisser seuls.
Qui est l’époux ou l’épouse ?
Et puis on pourrait aller plus loin dans la parabole et se dire que si nous sommes invités à un festin de noces, ce pourrait bien être aussi pour notre propre noce. Et que si nous acceptons d’entrer en relation avec nos prochains, et avec Dieu lui-même, nous pouvons devenir ultimement l’époux, ou l’épouse de Dieu qui nous invite. C’est le but ultime : parvenir à une intimité totale avec Dieu où tout ce qui est à moi est à lui et tout ce qui est à lui est à moi.
Cette idée est évoquée par d’autres paraboles et d’autres textes, comme le dit Paul : « je vous ai fiancés à un seul époux, pour vous présenter au Christ comme une vierge pure. » (2 Cor 11:2). Mais peut-être est-ce à dessein que la parabole des noces nous met dans le rôle simplement des invités. Qui en effet peut dire qu’il est en totale union mystique avec le Christ ? Sans doute est-ce un idéal, mais pour la plupart d’entre nous, il y a toujours une distance entre Dieu et nous, et notre foi n’est pas parfaite, idéale ou complète. En ce sens, notre parabole est rassurante : bénéficier de la joie de Dieu ne demande pas pour condition de nous marier avec lui, ni d’être parfaitement unis à lui, mais simplement d’accepter d’entrer, même avec plus ou moins de distance dans son entourage. Il y a comme cela beaucoup de fidèles dans nos églises qui peuvent se sentir un peu à distance, mais le simple fait de s’approcher de Dieu ou de l’Eglise peut procurer une grande joie. La fête n’est pas réservée à l’épouse, mais même celui qui tient la chandelle dans la parabole profite de toute la fête.
La seule condition donc, c’est d’accepter avec simplicité l’appel, bien vouloir tenter d’entrer en relation avec Dieu et avec les autres, et puis de jouer gentiment le jeu en acceptant de revêtir l’habit de noces qu’on nous offre. Alors bienvenue : entre dans la joie de ton maître !
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Matthieu 22:2-14
2Le royaume des cieux est semblable à un roi qui fit des noces pour son fils. 3Il envoya ses serviteurs pour appeler ceux qui étaient invités aux noces ; mais ils ne voulurent pas venir. 4Il envoya encore d’autres serviteurs en disant : Dites aux invités : J’ai préparé mon festin, mes bœufs et mes bêtes grasses sont tués, tout est prêt, venez aux noces. 5Mais, négligeant (l’invitation) ils s’en allèrent, celui-ci à son champ, celui-là à son commerce, 6et les autres se saisirent des serviteurs, les outragèrent et les tuèrent. 7Le roi fut irrité ; il envoya son armée, fit périr ces meurtriers et brûla leur ville. 8Alors il dit à ses serviteurs : Les noces sont prêtes, mais les invités n’en étaient pas dignes. 9Allez donc aux carrefours, et invitez aux noces tous ceux que vous trouverez. 10Ces serviteurs s’en allèrent par les chemins, rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, méchants et bons, et la salle des noces fut remplie de convives. 11Le roi entra pour voir les convives, et il aperçut là un homme qui n’avait pas revêtu un habit de noces. 12Il lui dit : Mon ami, comment es-tu entré ici sans avoir un habit de noces ? Cet homme resta la bouche fermée. 13Alors le roi dit aux serviteurs : Liez-lui les pieds et les mains, et jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents. 14Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.