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56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

 

Culte Radio Rameaux 2014

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Prédication prononcée sur France Culture par le pasteur Louis Pernot

INTRO :

Réjouis toi, fille de Sion, Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem!
Voici, ton roi vient à toi; Il est juste et victorieux,
Il est humble et monté sur un âne, sur un âne, le petit d’une ânesse. (Zach 9 :9)
Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur,
Paix dans le Ciel, et gloire dans les lieux très hauts.

Ce sont par ces paroles du prophète Zacharie que l’on ouvre traditionnellement l’office pour ce jour des Rameaux, pour célébrer l’entrée de Jésus à Jérusalem, peu avant sa Passion. L’Evangile nous dit en effet que pendant la fête, il a annoncé sa mort, et qu’entrant à Jérusalem, il a été célébré comme le Messie par ses disciples. Mais ce rôle de Messie, Jésus voulait l’interpréter dans sa version pacifique, un messie qui réalise les promesses de Dieu d’un point de vue spirituel et non politique, et qui vient non pas sur un cheval, en guerrier, mais sur un âne, en homme de paix.

Jésus vient donc non comme un guerrier, mais comme un berger, prêt à mourir pour ses brebis.

Ô berger d’Israël écoute, Toi qui nous as frayé la route, Vois ton troupeau près de périr, viens aujourd’hui le secourir, Fais briller sur nous ta splendeur, et nous serons sauvés Seigneur.

PREDICATION :

Jésus donc, lors de son entrée à Jérusalem annonce sa mort, et de fait, il mourra sur une croix peut de temps après. Il est d’usage de dire dans la prédication chrétienne que c’est la mort de Jésus qui nous sauve, qu’en mourant il nous libère du péché et nous offre le salut. Si cela est évident pour vous, alors tant mieux, mais je voudrais m’adresser à ceux pour qui justement cela ne semble pas évident, et qui ont du mal à comprendre ou à croire.

Et finalement, en quoi la mort de Jésus est-elle une bonne nouvelle, et en quoi cette mort peut-elle nous sauver ?

Il y a, bien sûr, les thèses classiques, mais elles posent aujourd’hui certains problèmes.

La première, c’est la lecture sacrificielle. On a enseigné en effet que la mort de Jésus était le prix payé à Dieu pour notre libération et le pardon de notre faute. C’est ainsi que l’on dit parfois que Jésus a été offert en « rançon » pour notre libération. Cette thèse est difficile à admettre.

D’abord l’idée de la « rançon » est odieuse. Généralement, on ne paye des rançons qu’à des gens peu sympathiques. Mais ce terme vient de ce que, en hébreu, la langue de la Bible, il n’y a qu’un seul mot pour dire « libérer », et « racheter », parce que dans l’antiquité, pour libérer un esclave, il fallait le racheter à son maître. C’est ainsi que quand la Bible dit que Jésus est venu pour nous « racheter », ou payer la « rançon », il faut entendre simplement qu’il est venu nous libérer. Et même dans l’Ancien Testament, cette libération appelée « rachat » peut se faire gratuitement sans qu’il faille payer quoi que ce soit. Le Rédempteur, celui qui rachète, c’est simplement celui qui nous libère, libère de ce que l’on appelle le péché et qu’on appellerait aujourd’hui la culpabilité, la peur, l’angoisse, la finitude et le découragement.

Donc pas de rançon, ni de rachat, Jésus nous libère, et Dieu nous sauve, sans prix, sans rien à payer, c’est la définition de la grâce. Nous sommes pardonnés et sauvés, avec ou sans mort, Dieu n’a pas besoin de ça.

Reste l’idée du sacrifice. « Jésus offert en sacrifice à Dieu pour notre salut ». Là, la chose est plus délicate, parce qu’on la trouve dans la Bible, non pas dans l’Evangile, il faut bien le dire, mais dans certaines épîtres, en particulier dans l’épître aux Hébreux. L’origine de cette idée est donc bien biblique, mais il faut le dire, tout de même très problématique, et aujourd’hui de plus en plus de théologiens s’en écartent. Comment admettre, en effet l’idée d’un Dieu qui exigerait la mort sanglante d’un innocent et de son propre Fils par dessus le marché, pour pouvoir nous sauver ou nous pardonner ? Ou Dieu veut nous pardonner, ou il ne veut pas, et s’il le veut, pourquoi ne voudrait-il le faire qu’au prix de la mort de son propre fils ? Cela donne de Dieu une image sadique et sanguinaire qui nous éloigne des propos du Christ d’un Dieu tout puissant dans sa grâce et sa capacité à aimer, et à pardonner.

On peut penser que cela vient d’un désir d’attirer les juifs à Jésus Christ, et que l’auteur de l’épître aux Hébreux, a essayé de raccrocher ses lecteurs juifs à ce qu’ils connaissaient, leur disant en quelque sorte : « vous pensez dans votre pratique que quand on a fait un péché, on peut offrir un sacrifice animal à Dieu et que le péché est pardonné... et bien là, Jésus, c’est comme un immense sacrifice de valeur infinie qui est offert à Dieu, et il compte ainsi pour tous les péchés de la Terre ». L’idée est intéressante, mais je ne crois pas plus qu’un sacrifice animal fasse que Dieu pardonne une faute, que Dieu puisse exiger un tel prix absurde pour nous donner son salut.

Une autre thèse classique est que Jésus « enlève le péché du monde ». « Christ agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde » chantons nous à la Cène. Cela est bien écrit dans l’Evangile de Jean, reste à savoir comment l’interpréter. Bien souvent, on l’a lu selon la théorie du « bouc émissaire » : Jésus se chargerait de tous nos péchés, et en mourant les emmènerait dans le néant avec lui. Cela existait aussi dans les anciennes coutumes d’Israël, où un bouc était chargé symboliquement de tous les péchés, et envoyé dans le désert, il mourait faisant disparaître les péchés avec lui. Pour prendre une image moderne, le mécanisme ressemblerait à celui de la lessive qui lave en capturant les particules de saleté dans le savon pour les entraîner lors du rinçage dans les égouts. Mais c’est une mécanique un peu trop primitive pour être vraiment adéquate à l’amour de Dieu. Et là encore, sans doute que les prédicateurs ont voulu bien faire, schématisant les choses pour les faire comprendre aux gens simples, mais c’est difficile de penser que Dieu soit contraint d’avoir recours à de tels pratique primitives. On peut penser que le sens de la citation est que l’Agneau de Dieu n’« ôte » pas le péché du monde, mais qu’il le « porte » comme il est dit en Jean 1:29 citant Esaïe 53, il « prend » sur lui le péché. Il est vrai que Jésus a dû supporter la bêtise et la méchanceté du monde qui est retombée sur lui.

Mais si Jésus n’est ni une rançon payée à un malfaiteur, ni une lessive qui lave nos fautes, alors que nous apporte sa mort ?

Une idée impie germe dans mon esprit : si Dieu n’a pas besoin de la mort de Jésus pour nous sauver, serions nous sauvés malgré la mort de Jésus ?

C’est ce que certains osent dire, et après tout pourquoi pas ? Ce qui nous sauve, ce n’est peut-être pas tant sa mort que sa vie, sa prédication, parce qu’il nous a fait connaître le Père, sa volonté à notre égard et son amour, nous serions ainsi sauvés plus malgré sa mort que grâce à elle. L’essentiel du Christ, c’est qu’il est la parole incarnée, c’est son témoignage, son Evangile, c’est cela qui nous donne la vie, et c’est pour cela que Dieu l’a envoyé dans le monde. Sa mort pourrait même être vue comme un échec : on aurait pu espérer que le monde l’écoute et se convertisse, au lieu de cela, il l’a rejeté et il l’a tué.

Cette idée est, certes, un peu provocatrice , et pourtant elle se trouve même de l’Evangile avec la Parabole des Vignerons en Matthieu 21:33. Là, le maître de la vigne qui est Dieu après avoir envoyé les prophètes qui ont été malmenés, veut envoyer son fils, et il dit : « ils écouteront mon fils », mais les vignerons le tuent. Ce que l’on voit, c’est que l’objectif de Dieu, son but, ce n’était pas que le fils meurt, mais qu’il porte la parole du père. La mort de Jésus n’est pas le but voulu, mais l’aboutissement regrettable de sa mission.

Dans ce cas, la mort de Jésus n’aurait de sens que par rapport à la résurrection : Dieu ne reste pas sur les échecs, mais il parvient à les transformer en chances. La résurrection, ainsi c’est l’affirmation que la vie du Christ ne se conclue pas par un échec, mais par une victoire au delà de cet échec. La résurrection, c’est la victoire du Christ sur la mort : ses opposants pensaient qu’en le tuant ils arrêteraient tout, et que Jésus cesserait d’être d’aucune importance pour l’humanité, mais voici qu’au contraire, son message, son esprit traversent et transcendent la mort qui n’arrête rien du tout d’important. L’essentiel traverse la mort, et malgré cette mort physique, Christ continue son œuvre de vie dans le monde, il continue d’être présent aujourd’hui parmi nous et dans nos cœurs.

Ainsi, on peut penser qu’en effet, la bonne nouvelle pour nous, ce n’est pas tant sa mort que sa résurrection, ou qu’en tout cas la mort de Jésus ne peut avoir de sens que si elle est lue à rebours à travers le bonne nouvelle de Pâques.

• Mais on peut ne pas se contenter de cela et vouloir chercher si la mort de Jésus ne pourrait pas avoir en elle-même quelque chose de positif pour nous. Et on peut le penser....

D’abord en ce que c’est un témoignage d’amour pour nous. Jésus aurait pu échapper à la mort en reniant son message, mais il a voulu aller jusqu’au bout... pour nous. Sa mort est donc signe de conviction, certainement, mais plus encore un signe d’amour. Parce que c’est pour nous, pour l’humanité et pour chacun d’entre nous que Jésus a voulu que son message puisse passer. On peut dire ainsi qu’il est offert pour nous, on peut même parler de « sacrifice », mais pas d’un sacrifice comme dans l’ancien testament pour racheter quoi que ce soit auprès de Dieu, Jésus s’est simplement offert en sacrifice pour nous, il a sacrifié sa vie pour que nous ayions la vie.

Jésus savait bien sûr que sa vie était le prix à payer (à la méchanceté du monde) pour pouvoir accomplir sa mission jusqu’au bout, et il l’a assumé. Ce n’est pas, donc, mécaniquement sa mort qui nous sauve, mais sans elle, son message ne nous serait même pas parvenu. C’est ce que dit Paul : « alors que nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous... à peine accepterions nous de mourir pour un juste... mais pour des pécheurs ! ». Ainsi Jésus, au lieu de nous condamner, de nous mépriser, nous juge même dignes de nous offrir sa vie : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime... ». Merci Seigneur Jésus !

• Et puis sa mort est l’application de son évangile. Jésus nous a appris qu’il y avait plus important que la vie physique. Il a dit : « ne craignez pas ceux qui peuvent tuer le corps et ensuite ne peuvent rien faire, craignez plutôt ceux qui peuvent tuer l’esprit, l’âme... ». Il a enseigné que nous étions plus que des animaux, que la vie était bien plus que le corps ou le vêtement, l’essentiel, l’éternel étant de fait d’aimer, de donner, de servir... Et voilà qu’il est mis lui-même au pied du mur, soit il renonce à sa vie physique, soit à tout ce qui a fait sens dans sa vie, et il choisit, le sens, le don, l’amour... Et voici que la suite de l’histoire, le commencement de l’Eglise, et le fait que nous en parlions encore aujourd’hui, lui donne raison : la mort physique n’était pas grand chose de désastreux en fait. Sa mort et la conscience de sa résurrection par les chrétiens est donc la preuve absolue de la véracité de son message, sans cela, nous ne pourrions en être vraiment sûrs.

Il a donc bien voulu se confronter lui-même à ce qui nous fait le plus peur : la mort, pour prouver qu’il y avait plus grand et plus fort que la mort physique. La mort du Christ nous montre qu’en fait, la mort n’a rien emporté. Les adversaires de Jésus pensaient tout arrêter en le tuant, mais la mort n’a emporté qu’une dépouille putrescible, elle n’a pas emporté l’essentiel qui est invisible pour les yeux. Et la puissance du Christ continue au delà de sa mort, nous en sommes les témoins.

Ainsi ce qui nous sauve, c’est Dieu, et par sa propre volonté, sans qu’il y ait besoin de faire appel à des mécanismes humains et primitifs. Dieu nous sauve, parce qu’il est amour... Mais par Jésus, nous le savons, nous en avons la preuve. Par Jésus nous sommes sauvés si ce n’est de la mort, au moins de la peur de la mort, et par Jésus, nous savons que Dieu s’approche pour nous donner la vie, nous offrir la vie éternelle, et par lui, nous pouvons dire le « oui » de la foi à Dieu, et ainsi saisir cette vie Eternelle à laquelle nous sommes appelés et que nous aurions pu risquer de laisser filer si lui ne nous l’avait pas démontrée.

Ainsi par la mort et la résurrection du Christ, nous savons qu’il était la Parole qui demeure éternellement, et que cette parole est une parole d’amour, de grâce et de pardon, ainsi sommes-nous certainement sauvés, il l’a dit, et nous en avons la preuve, sauvés aussi de la peur et de l’absurde, et nous savons que nous sommes aimés.

Amen

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Evangile de Jean (12, 12-24)

La foule nombreuse de gens venue pour la fête, apprit que Jésus se rendait à Jérusalem ; ils prirent des branches de palmiers et sortirent à sa rencontre, et il criaient : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d'Israël.

Jésus trouva un ânon et s'assit dessus, selon ce qui est écrit :
Sois sans crainte, fille de Sion ; Voici, ton roi vient, Assis sur le petit d'une ânesse.

Ses disciples ne comprirent pas cela tout d'abord ; mais quand Jésus fut glorifié, alors ils se souvinrent que ces choses étaient écrites de lui, et que, pour lui, ils les avaient faites...

Or il y avait là quelques payens parmi les gens qui étaient montés pour adorer pendant la fête.Ils s'approchèrent de Philippe, de Bethsaïda en Galilée, et lui demandèrent : Seigneur, nous voudrions voir Jésus. Philippe alla le dire à André, puis André et Philippe allèrent le dire à Jésus.

Jésus leur dit : L'heure est venue où le Fils de l'homme doit être glorifié. En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit..

Jean 12:12-24