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Paul et le secret du succès du christianisme

Prédication prononcée le 26 mai 2024, au temple de l'Étoile à Paris,
par le pasteur  Louis Pernot

 

Je voudrais aujourd'hui m'interroger sur la nature de l'Église et sur la manière avec laquelle nous pouvons essayer d'être fidèles, dans le monde qui est le nôtre, pour vivre et témoigner de la bonne nouvelle de l'Évangile. Pour cela, réfléchir à ce qui a pu faire en sorte que le christianisme connaisse ce développement extraordinaire à ses débuts, juste après la mort du Christ, pour devenir une religion planétaire.

En effet, à la Pentecôte, 50 jours après la mort et la résurrection du Christ, les disciples reçoivent l'énergie du Saint-Esprit et sont prêts à tout. Mais c'est Paul qui va véritablement inventer le christianisme. Jésus n'a pas créé de religion, de rite, ni d'organisation. Une religion, ce n'est pas simplement un message. On peut dire que le christianisme a pris ce message de l'Évangile comme le cœur atomique de l'Église, mais ensuite, il en a été fait quelque chose qui permet qu'aujourd'hui, nous soyons ici réunis pour en parler. À la Pentecôte, les disciples ont un trésor : le message de l'Évangile, la prédication du Christ, et c'est encore notre trésor. Ils ont l'énergie, la puissance du Saint-Esprit en eux. Que vont-ils en faire ? C'est Paul qui va avoir des intuitions géniales et qui va réussir à faire en sorte que l'Église chrétienne existe.

Reconversion du judaïsme en crise

Il faut se replacer dans la situation dans laquelle arrive le début de l'Église chrétienne. Avant la destruction du Temple de Jérusalem en 70, le judaïsme connaissait un succès considérable. Il était développé dans tout le bassin méditerranéen, et énormément de gens fréquentaient les synagogues, juifs ou non. Il y avait, en effet, aussi beaucoup de païens, qu'on appelait les « hellénistes » ou les « craignant-Dieu », qui suivaient le judaïsme sans être juifs.

Puis, il y a eu la destruction du Temple de Jérusalem en 70 et l'avènement de l'Empire romain avec des mentalités nouvelles. Il y a eu une situation de crise extrêmement compliquée, dans laquelle le judaïsme a dû s'adapter. Cette situation de crise, de mutation considérable de la société dans l'Antiquité, a permis la naissance du christianisme. Comme le dit Darwin, qui n'évolue pas, meurt. Évoluer est vital et essentiel pour une religion, comme pour tout être vivant. Les crises et les mutations ont toujours été, pour tout vivant comme pour les religions, à la fois des dangers mortels et des opportunités pour que quelque chose de neuf surgisse. Dans toute l'histoire des religions, chaque fois qu'une religion nouvelle a pu s'imposer, cela s’est produit dans une situation de crise ou de mutation importante. Le christianisme est né dans cette situation de crise du judaïsme et dans l'émergence de l'Empire romain. La Réforme est née dans cette période étonnante qu’a été la Renaissance, d'un changement total des mentalités, avec en plus l'apparition de l'imprimerie et la redécouverte des textes antiques. À chaque fois, cela a permis la naissance d'une religion nouvelle.

Ce qui fait réfléchir, c'est qu'aujourd'hui, nous sommes également dans une situation extrêmement compliquée. D'abord de mutations considérables. Le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui n'a à peu près rien à voir avec celui qui existait il y a 100 ans en 1924. Même il y a 50 ans, en 1974, le monde n'avait rien à voir avec celui d'aujourd'hui. Il y a eu des changements radicaux de société, de mentalité, et également de technologies, de communication. L'irruption d'Internet et d'autres choses ont bouleversé le monde et continuent de le bouleverser. Nous sommes dans une situation de mutation radicale et il y a là un virage à ne pas manquer, faute de se retrouver plus ou moins exclus de l’histoire du monde qui est en train d’émerger.

Si on reprend l'exemple du judaïsme, confronté à la destruction de son temple de Jérusalem en 70, et à cet Empire romain arrivant avec des idées et des mentalités nouvelles, il y a eu deux voies différentes qui se sont exprimées pour essayer de se réinventer. La première a été le repli identitaire, représenté par les pharisiens pensant que ce n'était pas grave de ne plus avoir le Temple, et qu’il fallait juste se recentrer sur la pratique, sur la Loi, sur une judéité encore plus étroite, encore plus pratiquante et plus formelle. Ce repli identitaire des pharisiens n'a pas été un échec total, ça a fonctionné, il y a encore aujourd'hui des juifs traditionnalistes. Mais d'une certaine manière, cela n'a pas non plus été un triomphe. Le judaïsme, par rapport à la situation de développement considérable qu'il avait dans tout le bassin méditerranéen dans l’Antiquité s'est plutôt réduit, voire parfois recroquevillé sur lui-même.

Puis, il y a eu l'autre voie, celle de Paul en particulier et des premiers chrétiens, qui a été l'ouverture et l'adaptation au monde ambiant. Paul a eu le génie de reprendre le judaïsme et de l'adapter avec souplesse au monde romain et à la culture nouvelle. Pour cela, il a su ôter du judaïsme tout ce qui faisait un obstacle insurmontable par rapport à l'Empire romain, permettant l'accès des païens à une religion dans laquelle il leur était très difficile d'entrer.

Je ne citerai qu'un exemple, celui de la circoncision. Les premiers chrétiens étaient juifs et donc se faisaient circoncire. La circoncision, pour l'Empire romain, était un véritable problème. Les Romains ne pouvaient pas envisager de se faire circoncire. On était encore dans la culture grecque des gymnases où l'on combattait nu, et un homme circoncis dans l'Empire romain, c'était une infamie, ce n'était pas possible. C'était donc un obstacle.

Paul, très astucieusement, va dire que finalement, l'important, c'est le message, le sens du geste plus que la pratique elle-même. Il va donc adapter ce judaïsme dont il hérite, ce judéo-christianisme, aux païens, en enlevant la circoncision. Il va simplifier la religion formelle en disant, comme dans Romains 2, que la circoncision physique n'est pas très importante, l’essentiel étant la circoncision du cœur (Rom. 2:25-29). On peut alors très bien être chrétien sans être circoncis, l'important, c'est la disposition du cœur. C'est une révolution considérable d'avoir lâché un élément de tradition du judéo-christianisme en essayant de garder l'essentiel du message et en laissant de côté quelque chose qui était un obstacle pour la société dans laquelle il parlait.

Réinventer le christianisme pour notre société en mutation

Cela est extrêmement important pour nous parce que notre société aujourd'hui a vécu et vit des mutations considérables, des révolutions intellectuelles, culturelles, sociétales et techniques. Comme Paul, nous héritons aujourd'hui d'une religion qui est, en fait, celle du XIXe siècle. Catholiques comme protestants, nous regardons trop souvent en arrière sur ce qu'était notre chrétienté il y a 50 ou 100 ans, en regrettant cet âge d’or où la religion était puissante, bien établie et les pratiquants nombreux. Que faisons-nous de cet héritage ? Comment allons-nous trouver une issue pour permettre à cet héritage fondamental, qui réside finalement dans le message plus que dans la forme, pour faire en sorte que le christianisme du XIXe siècle dont nous sommes les héritiers devienne la religion du XXIe siècle ?

Pour cela, comme à l’époque pour le judaïsme, il y a deux hypothèses. Ces deux hypothèses donnant aujourd'hui deux types d'Églises qui peuvent fonctionner. Il y a celle du repli identitaire, comme l’avaient proposé les pharisiens. Chez les catholiques, cela correspond à la tendance des traditionalistes. Cela fonctionne, on trouve des fidèles pour cela, des gens qui veulent dire la messe de Saint Pie V comme au XIXe siècle. Chez les protestants, on pourrait dire que ce sont certaines Églises évangéliques qui, sous des aspects modernes, prêchent en fait une théologie d'avant la révolution scientifique, et parfois même extrêmement rétrograde. Cette solution traditionnaliste restera toujours marginale, même s'il elle aura toujours quelques adeptes. Les traditionnalistes catholiques ne sauveront pas le catholicisme, et une théologie éculée ne sauvera pas le protestantisme. On ne peut pas, aujourd'hui, proposer une religion qui se coupe de la culture et du monde moderne dans lequel on se trouve.

La deuxième solution, qui m’attire plus, est de nous ouvrir à la culture actuelle et moderne, comme Paul l'a fait en son temps. Il s'agit de réinterpréter notre Église pour qu'elle puisse être reçue par nos contemporains. Et cela ne se limite pas à la forme. L'erreur de certaines Églises est de penser que pour être moderne, il suffit d'avoir une forme moderne : enlever l'orgue, mettre des guitares électriques, faire prêcher le pasteur sans sa robe du XVIe siècle mais avec un micro à la Star Trek en souriant à l'américaine. L'enjeu fondamental se situe dans le contenu.

Paul lui-même a réadapté le message de l'Église chrétienne pour qu'il soit recevable par ses contemporains du bassin méditerranéen. Prenons l'exemple de la résurrection des morts, message de base de l'Église naissante avec le Christ ressuscité. Dans la pensée grecque et latine, cela ne passait pas, les philosophes grecs et romains étaient incapables d'accepter une telle pensée. Paul a eu l'intelligence de spiritualiser le message, comme on le lit dans 1 Corinthiens 15. Devant l'opposition des chrétiens de l'Église de Rome ou de Corinthe qui ne pouvaient croire à la résurrection des morts, Paul la réinterprète en disant qu'on est semé corps matériel mais qu'on ressuscite corps spirituel, dans le domaine de l'éternel, de l'invisible. En spiritualisant cette foi essentielle, Paul rend le message chrétien romano-compatible et proche de la foi dans l'éternité de l'âme de la philosophie grecque.

Tout le travail des premiers chrétiens va dans ce sens. Le passage de l'hébreu ou de l'araméen au grec est une révolution considérable, on n'est plus une religion moyen-orientale réservée au juifs mais une religion « moderne ». Quand l'évangile de Jean commence en disant en grec "Au commencement était le Logos", un Grec ou un Romain nourri de philosophie stoïcienne entend quelque chose qui ne lui est pas totalement étranger. Tout l'évangile de Jean a pu être relu dans ces catégories, permettant à la pensée chrétienne de se diffuser.

Nous sommes aujourd'hui face à un défi semblable. Comment trouver l'essence du message de l'Évangile et faire en sorte qu'il soit audible par nos contemporains, par rapport au monde moderne ? C'est ce que j'essaie de faire, notamment dans mon livre Un christianisme pour le XXIe siècle, en redisant les éléments de la foi chrétienne sans utiliser les mots du patois du XIXe siècle qu'on n'entend que dans les églises.

Pour cela, il faut analyser les caractéristiques de notre société contemporaine occidentale pour pouvoir en tenir compte. On peut considérer qu'elle est dominée par deux choses. D'abord, pour la majorité des gens raisonnables, une vision rationnelle du monde, héritière de Descartes et des Lumières. Nous croyons dans l'intelligence, la raison, et que la science décrit adéquatement le fonctionnement du monde physique et même psychique. Quand on veut savoir quel temps il fera demain, on regarde la météo et on ne demande pas au prêtre de prier. Un couple stérile consulte des médecins spécialisés plutôt que d'invoquer Dieu. Nous devons parvenir à rendre le message de l'Évangile rationnel et scientifico-compatible.

L'autre caractéristique est que nos contemporains vivent bien. Nous avons un toit, de quoi manger, des loisirs. Beaucoup peuvent se contenter de leur existence terrestre et sociale. Pendant la guerre de 1914, un proverbe disait « Il n'y a pas d'athée dans les tranchées ». Face à l'angoisse, au danger, à la souffrance, la religion propose souvent une fuite vers un paradis imaginaire. Une partie de la dé-spiritualisation de notre société vient du fait que les gens n'ont plus besoin de s'enfuir dans un monde spirituel pour bien vivre. On souffre d'être dans une société qui ne souffre pas.

Cela n'est pas vrai pour tous. Il y a des populations en difficulté, même chez nous, en particulier les immigrés déracinés, les personnes en fragilité psychologique, au chômage, avec une situation familiale complexe, ce n’est pas un hasard si ces personnes sont la cible première de prédicateurs au message simpliste prêchant en substance : « Votre vie est une horreur, donnez-la à Jésus-Christ et tout ira bien »... Le succès des megachurchs, ces églises évangéliques que l'on trouve en Amérique du Sud, au Brésil ou ailleurs, s'explique par leur capacité à convertir des milliers de personnes en leur faisant miroiter autre chose que la situation catastrophique dans laquelle elles se trouvent. Mais si l'on ne veut pas jouer ce jeu-là et que l'on souhaite parler aux gens qui ne sont pas nécessairement en grande souffrance, comment faire en sorte que l'Évangile s'intègre dans une vie quotidienne non dramatique ?

Ne pouvant plus dire aux gens que le monde matériel est mauvais, que leur vie physique est une catastrophe et qu'ils doivent fuir pour venir à Dieu et en Jésus-Christ. Il faut leur montrer que leur vie, telle qu'elle est, peut être accueillie dans une dimension spirituelle, que leur vie n'est pas un obstacle à la spiritualité et qu'ils peuvent se dire chrétiens même avec ce qu'ils sont aujourd'hui.

Cependant, cela ne suffit pas. Si l'on considère que sa vie est plutôt bonne, pourquoi se déplacer le dimanche matin au lieu de rester au lit à dormir ? À un moment donné, la spiritualité doit apporter une plus-value. La question est de savoir en quoi le message de l'Évangile va permettre d'apporter quelque chose de plus, même si ce n'est pas une fuite, à cette vie terrestre et matérielle que l’on assume et accepte ?

Ré-enchanter le quotidien

A ce sujet, les premiers chrétiens ont eu une intuition absolument géniale : ils ont su ré-enchanter le monde matériel. Ils ne l'ont pas fui, mais ils l'ont intégré dans la sphère même du religieux. On le voit déjà en balbutiement dans l'Eglise chrétienne avec les premières réunions qui étaient des églises de maison. C’était tout à fait révolutionnaire à une époque où beaucoup pensaient que pour adorer Dieu, il fallait aller dans des lieux consacrés ou faire des pèlerinages. L'Eglise chrétienne dit que vous pouvez adorer Dieu à 4 ou 5 chez vous. On réinvente et on ré-enchante le quotidien, et votre vie quotidienne devient le temple du Seigneur. De même, les premières assemblées chrétiennes étaient sous forme de repas, d'agapes. Ainsi, le simple fait de manger et de boire ensemble, entre amis devenait en soi un culte à son Dieu. Ré-enchanter le quotidien et ce que l'on vit ordinairement pour en faire quelque chose de spirituel qui s'élève à Dieu, voilà ce qu'ils ont su faire.

C'est également ce qu'a proposé la Réforme en abolissant la distinction entre actes religieux et actes profanes. Elle a affirmé que la meilleure manière de louer Dieu, c'est dans son travail quotidien : faites ce que vous avez à faire comme pour Dieu, pour sa seule gloire, et ainsi même le travail le plus humble et le plus modeste pourra devenir une prière à Dieu. Celui qui fait un travail imbécile et répétitif toute la journée voit son travail ré-enchanté, glorifié, spiritualisé, et il devient la plus belle et la plus enthousiasmante des choses. C'est ce que nous devons continuer à faire : montrer comment on arrive à mettre le spirituel dans le quotidien.

Mais cela ne suffit pas, et c'est une interrogation que pose Dominique Desjeux dans son livre "Le Marché des dieux", qui nous a inspiré, et où il étudie précisément comment certaines religions ont réussi à fonctionner correctement. Il affirme qu'une religion ne peut avoir du succès que si elle est efficace, c'est-à-dire si elle sert à quelque chose. Les premiers chrétiens ont très bien su fonctionner ainsi et répondre à ce critère avec les miracles et les guérisons. « Croyez, donnez votre vie à Jésus-Christ et vous serez guéri », voilà qui était une prédication très efficace sur l’utilité de la prière, qui pouvait donner une raison forte d'être croyant. Même l'établissement du christianisme repose sur un fonctionnement similaire, qui était, selon moi une méprise considérable quant au rôle de Dieu. Constantin avait une épouse chrétienne qui a prié pour qu’il remporte une victoire militaire. Il dit : si je gagne, je me convertis à ton Dieu. Constantin gagne, se convertit et fait du christianisme la religion de l’Empire romain.

Cependant, aujourd'hui, je ne crois pas que Dieu gère les victoires des guerres. Si chaque peuple prie qui Dieu va-t-il faire gagner ? Si nous sommes dans un monde scientifique et que l'on croit que la plupart des processus naturels auxquels nous sommes soumis sont autonomes - la météo, le travail, le chômage, la fécondité - alors que gère Dieu ? Si on ne croit plus au miracle, à quoi sert-il de croire en Dieu ? Certes, la religion apporte des valeurs, des idéaux, un sentiment d'appartenance, une culture, une histoire. Mais si elle ne sert à rien de concret, cela ne suffit pas. À quoi sert d'être chrétien aujourd'hui ? Ce sera l’objet d’une prochaine prédication. C'est une question trop importante pour être traitée ici, mais il faudra y revenir, car je crois que c'est essentiel.

Modernité et tradition

Enfin, sur la question de la forme, faut-il tout réinventer ? Je ne suis pas sûr. Je pense que l'essentiel de la modernisation de la religion doit être dans la réinterprétation du message. La prédication doit être résolument moderne, mais quant à la forme, il ne faut pas tout jeter aux orties. Ce serait une erreur de rompre avec toute forme de tradition. Il faut que la religion soit la plus simple possible pour ne pas être un obstacle, mais notre époque se caractérise par un attachement particulier à la tradition. Nous n'aimons pas le changement, comme en témoignent notre préoccupation pour les monuments historiques, le succès des Journées du patrimoine, le devoir de mémoire, le goût même des jeunes pour le vintage. Les immigrés qui viennent en France se raccrochent à leur culture, leur histoire, leur tradition, leur milieu historique d'origine. Nous avons besoin d'avoir des racines. Au fond, nous avons peur du changement, une angoisse colossale rôde dans notre société : peur du changement climatique, des changements sociétaux, politiques, peur de tout. Il y a en chacun de nous une quête de l'immuable, car nous sommes angoissés par l'avenir. Nous avons besoin de quelque chose qui stabilise le temps, et tout ce qui le stabilise est infiniment rassurant.

J’ai vu quelqu’un l’autre jour qui revenait à l’Étoile pour la première fois depuis quarante ans. « Quelle émotion de voir que cette église n’a pas changé », m’a-t-il dit. Ce n’est pas rien. On ne peut pas être sans arrêt dans un temps qui passe, qui détruit tout, où tout devient n'importe quoi, où tout passe et disparaît sans qu'on ne puisse rien maîtriser. Si tout est remis tout le temps en cause, l'avenir devient angoissant. Il faut une forme d'ancre, et c'est pourquoi la religion que je préconise est à la fois ouverte, mais aussi en partie traditionnelle.

La religion peut être traditionnelle dans une certaine forme qui ne s'oppose ni à une vision contemporaine du monde, ni à la religion elle-même. Elle permet de cadrer et de restructurer. Elle est structurante mais peut être aussi contemporaine, car elle réinterprète le discours dans des catégories que nous pouvons comprendre aujourd'hui, et cela est essentiel.

Toute cette réflexion n’est pas vaine, même si elle peut sembler s’éloigner du fonds essentiel et spirituel de notre religion. Mais c’est qu’en fait, la forme, les rites et même les croyances sont secondaires. L'important est ce qu'il y a, au cœur de tout cela, un message inestimable, un véritable trésor : celui de la bonne nouvelle de l'Évangile, du message de la Croix. C'est la bonne nouvelle de l'amour inconditionnel de Dieu, de sa grâce et de sa bonté infinie qui nous est donnée, qui nous accueille et nous transforme. C'est aussi la bonne nouvelle de la résurrection : ce Seigneur en qui nous mettons toute notre confiance a vaincu la mort et nous ouvre toutes les portes de l'espérance, de la paix, de la vie, de la joie et de l'amour.

Il nous reste à être capables de transmettre ce message à nos contemporains, et c'est un véritable défi, non seulement pour moi qui prêche, mais je crois pour nous tous. C'est pourquoi je prie Dieu de nous inspirer autant que ces premiers chrétiens l'ont été, eux qui nous ont permis d'hériter aujourd'hui de cette foi chrétienne, le plus beau trésor de l'humanité pour que nous sachions la transmettre, vivante, à notre tour.

Amen.

Louis Pernot

Cette réflexion a été inspirée du beau livre de Dominique Desjeux, "Le marché des Dieux" (Puf)
https://www.puf.com/le-marche-des-dieux?v=12940

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Romains 2:25-29

25Certes, la circoncision est utile, si tu pratiques la loi ; mais si tu transgresses la loi, ta circoncision devient incirconcision. 26Si donc l’incirconcis observe les ordonnances de la loi, son incirconcision ne sera-t-elle pas comptée comme circoncision ? 27L’incirconcis de nature, qui accomplit la loi, ne te condamnera-t-il pas, toi qui la transgresses, tout en ayant la lettre (de la loi) et la circoncision ? 28Le Juif, ce n’est pas celui qui en a les apparences ; et la circoncision, ce n’est pas celle qui est apparente dans la chair. 29Mais le Juif, c’est celui qui l’est intérieurement ; et la circoncision, c’est celle du cœur, selon l’esprit et non selon la lettre. La louange de ce Juif ne vient pas des hommes, mais de Dieu.

 

Rom. 2:25-29