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Pépites bibliques

Pépites Bibliques

La pépite biblique du moment

Faire connaître 100 textes (et plus !) en donnant quelques clefs de lecture : c’était là notre idée de départ...
Alors qu’ils suscitent tant d’enthousiasme en chacun de nous personnellement, pourquoi attendre qu’ils soient tous rassemblés avant de vous les délivrer ? Et l’idée est née de partager notre travail au fur et à mesure : certains lecteurs y retrouveront des références maintes fois entendues, d’autres au contraire découvriront peut-être certains récits pour la toute première fois...
Ces nouvelles propositions sont le fruit d’une synthèse à quatre mains : deux mains y travaillent patiemment depuis plus de 30 ans, les deux autres viennent fouiller dans les différents supports de ces 30 ans (leçons bibliques, sermons, vidéos) pour essayer d’en retirer la substance nous permettant de donner un sens profond (ou parfois même plusieurs sens) à chaque récit biblique indiqué.
Certaines compréhensions paraîtront classiques, d’autres sans doute un peu moins habituelles : nous souhaitons qu’elles permettent au lecteur de s’intéresser encore davantage au message de vie que la Bible nous donne.
Ces textes seront présentés de manière aléatoire, comme une chronique, peut-être une pépite du moment ?

Louis Pernot - Muriel Bernhardt

Les pèlerins d'Emmaüs


Luc 24:13-35

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Si la résurrection du Christ est devenue le fondement du christianisme, la rencontre avec Jésus ressuscité suscite bien des interrogations. Voici une de ces rencontres, par exemple, qui a pourtant été maintes fois représentée par les artistes au fil des siècles. Peut-être parce que ce récit bien connu des pèlerins d'Emmaüs interpelle pour sa ressemblance avec l'expérience que chacun peut faire de la découverte du Christ dans sa vie ? En effet, le chemin de tristesse dans lequel ces disciples sont d'abord plongés se transforme petit à petit en un chemin lumineux de bonne nouvelle vers les autres, grâce à leur marche avec le Christ ressuscité.

Mais comment peut-on croire à la résurrection du Christ ? Certains y croient littéralement : Jésus s’est relevé en chair et en os, est apparu aux disciples pendant 40 jours (jusqu’à l’Ascension), puis ensuite, il sera seulement encore présent spirituellement. D'autres, en revanche, disent que c’est une façon de parler : pour eux, le Christ est vivant dans l’esprit des disciples qui ont bien compris que même mort, il les accompagne quand même. Nous avons chacun la liberté de croire aux différentes formes de la présence du Christ, selon ce qui nous semble le plus encourageant pour notre vie, pour notre foi : présence réelle, spirituelle, ou les deux ? Même mort, Jésus continue de vivre éternellement avec tous les fidèles. On peut parfaitement croire à la résurrection, sans toutefois croire aux apparitions.

Jésus avait prêché pendant trois ans et proposait une religion du cœur très libre et responsabilisante, qui s’opposait à la religion des autorités de l'époque, fondée sur l'observance de commandements et de rites multiples. Les autorités juives ont donc voulu tuer Jésus qui rassemblait les foules. Il a alors été trahi par un apôtre, Judas, puis il a été jugé sur la base de faux témoignages, et, crucifié, il est mort le Vendredi saint (à 15h). Il est mis dans un tombeau, une grotte fermée par une grosse pierre ronde. Et le surlendemain, une fois passé le sabbat, des femmes vont au tombeau, et trouvent ce tombeau vide !

C'était le dimanche, premier jour de la semaine, ce dont nous nous souvenons en particulier à Pâques, mais chaque dimanche rappelle d'ailleurs la résurrection de Jésus aux chrétiens : en effet, selon le récit des évangiles, ce premier dimanche de Pâques, des femmes ont vu le Christ ressuscité !

Dans ce texte, il s'agit donc d'un récit d’apparition de Jésus, qui ne relate pas seulement un événement passé, car nous pouvons facilement nous identifier à ces deux pèlerins et grâce à eux, saisir comment le Christ peut nous apparaître aujourd’hui, ici et maintenant. Les pèlerins s'éloignent de Jérusalem ce même dimanche de Pâques, pour faire 60 stades (environ 10 km), 6 étant le chiffre symbole du mal, comme s'ils s'éloignaient un peu de la présence de Dieu.

Certainement, ils sont tristes et complètement désorientés : ils viennent de perdre leur ami, leur guide, celui dont ils attendaient qu'il les délivre (de l’occupant romain notamment), celui dont ils pensaient qu'il allait régler tous les problèmes dans le monde, celui dont ils espéraient tant ! Finalement, il est mort, cloué sur une croix !


Et voilà que ces amis errent et se dirigent vers Emmaüs, ville qui semble d’ailleurs ne pas exister. Mais Emmaüs rappelle un autre récit bien plus ancien situé au même endroit et à la même heure, au coucher du soleil : le rêve de Jacob, où Jacob voit des anges monter et descendre d'une échelle entre le Ciel et la Terre, et il comprendra que « Certainement Dieu était là et je ne le savais pas » (Gen.28:16). Et Jacob appellera ce lieu Béthel, c'est-à-dire maison de Dieu, en opposition au nom initial (Oulam-Louz) qui signifiait « porte de l'éloignement », de la fuite peut-être... de l'errance, de l'égarement ? Comme pour ces deux disciples ? Et pourtant dans ces deux cas, Dieu se rend présent par sa parole : celle des anges pour Jacob, celle de l'étude des textes pour les disciples.

Dans un premier temps, les disciples se remémorent toute l'histoire de Jésus, les événements qu'ils ont vécu avec lui, sans doute le message qu'il leur a enseigné. Et c'est vraiment pendant qu'ils cherchent à comprendre tout ce qui vient de se passer, pendant qu'ils réfléchissent à tout cela, que Jésus s'approche d'eux, comme si le fait de parler de Jésus avec d'autres, de débattre à plusieurs, d’être curieux, comme si d'essayer de connaître Jésus nous rapprochait un peu plus de lui !

Jésus marche avec eux, mais ils ne le savent pas. Jésus nous accompagne toujours toute notre vie comme il l’a promis en Matt.28:20 : « Je serai avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ». Mais on ne s’en rend pas toujours compte. Il est d’autant plus présent qu’on parle de lui (comme le faisaient les disciples), et qu’on s’interroge à son égard. Et lui-même vient nous aider en nous posant des questions, comme il interroge les disciples sur les raisons de leur tristesse et sur les événements passés. De même, certains textes bibliques nous paraissent parfois bien compliqués et nous posent question pour nous permettre de trouver des réponses, chacun pour soi, là où il en est...

Pour aider ses amis si tristes, Jésus les réprimande d'abord un peu (comme cette Parole de Dieu qui peut nous contrarier et nous questionner !), mais surtout, il leur fait réviser toute la Bible, il leur explique les Écritures.

Et cette parole qu'ils étudient avec Jésus devient pour les disciples une véritable nourriture, le pain de la vie, une source de force et de joie pour leur existence. Ils le reconnaissent clairement quand il rompt le pain, comme un rite de communion. Ainsi, la liturgie, le culte, la communion et l'exploration des textes bibliques nous aident à reconnaître le Christ qui nous accompagne et à mieux le connaître.

Et même dans nos chemins d'égarement, même dans une lecture de la Bible qui peut nous sembler aride, Dieu nous rejoint et fait route avec nous, sans nécessairement que nous nous en rendions compte, mais bien réellement. Il n’est pas toujours facile de déceler la présence de Jésus, c’est un travail incessant, car Jésus veut toujours aller plus loin, on ne peut pas se contenter de là où l'on en est.

On n’attend pas une présence physique du Christ ressuscité, mais on dit que Christ est vivant, qu'il est ressuscité pour nous. Aujourd’hui, il est présent spirituellement, par son esprit, son enseignement. Comme il l'a dit aussi: « là où deux ou trois seront réunis en mon nom, je serai au milieu d’eux » (Matt.18:20).

Jésus est bien resté avec les disciples quand ils le lui ont demandé, comprenant que sa présence leur faisait du bien, mais il s'est retiré physiquement lorsqu'ils l'ont reconnu. La foi est ainsi : parfois, on peut avoir l'impression de ressentir Dieu à nos côtés, à d'autres moments, on peut penser qu'il s'est complètement éloigné de nous. Évidemment qu'il est toujours là, et c'est fécondée par cette présence que notre existence sera fertile, que nous pourrons nous tourner vers les autres pour devenir témoins de cette parole de vie, de cette source de force, d’espérance, de paix et d’une joie pétillante, de même que les disciples sont retournés à Jérusalem sans attendre pour partager leur foi « retrouvée », nourris d’espérance et de la paix de Jésus ressuscité.

Ce que Jésus a prêché, son témoignage et sa bonne nouvelle d’amour restent vrais, par-delà sa mort ! Jésus est toujours présent, vivant par ceux qui croient en lui, par ceux qui se nourrissent de ce qu’il a été ! Ainsi, cette résurrection nous apprend que l’essentiel de la vie de Jésus, et sans doute de chaque vie, que le message d’amour et de service peut continuer d’être transmis à travers les âges, « pour que les cœurs brûlent au-dedans de chacun... » en présence du Christ ressuscité.

Louis Pernot – Muriel Bernhardt

La vocation de Samuel


I Samuel 3:1-12

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Nous croyons que Dieu appelle chacun... mais comment le fait-il ? Dieu nous « parle », néanmoins il peut nous sembler souvent bien difficile d’entendre sa voix, ou de la reconnaître ! L'exemple de la vocation du petit Samuel va sans doute nous donner quelques pistes de réflexion pour accueillir cette « parole » que Dieu nous adresse : l’enfant Samuel, pourtant un futur célèbre prophète, s’est lui-même d’abord trouvé dans l’incompréhension. Et ce récit introduit ainsi une base de la foi chrétienne, l’archétype même de la juste prière : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute. »

Samuel n'est pas élevé par sa famille, mais il grandit au temple, auprès du prêtre Eli qui était déjà fort âgé. En effet, Anne, sa maman, avait promis de consacrer Samuel à Dieu, après avoir longuement prié pour tomber enceinte et enfanter. Samuel est donc certes élevé dans « l'évidence » de Dieu (Eli signifiant d'ailleurs « Dieu est mon Dieu »), mais il ne suit pas d'éducation religieuse particulière.

Il dort dans le temple, tout près de « l'arche de Dieu », aussi appelée « arche d’alliance », un coffre en acacia recouvert d’or où les israélites avaient mis les tables de la Loi, et cette arche représentait le lieu le plus sacré de la présence de Dieu. Ce coffre était sous une tente, la « tente de la rencontre ». Ici, il semble être placé dans un bâtiment qu’ils avaient dû récupérer à Silo, le temple en dur ne sera construit que plus tard par Salomon. Samuel était donc nuit et jour au plus proche du « divin » à cette époque !

« La parole de l’Eternel était rare en ce temps-là... » : cela correspond sans doute historiquement à un temps de « vide » où il ne se passe pas grand chose. Il y avait eu Moïse dans sa relation avec Dieu et le don des dix commandements, puis un peu un vide de « parole divine » avant les prophètes Elie et Elisée, suivis encore d'autres grands prophètes. Aujourd'hui, pour nous, dans notre propre vie, on peut également dire que la communication avec Dieu est susceptible de connaître des hauts et des bas, avec des vides, et il ne faut pas s’en culpabiliser… Il peut y avoir des moments où nous avons l'impression que Dieu nous parle, et d'autres où c'est le silence total, même en lisant des textes bibliques. Et c’est parfois dans les moments où l'on se croit au plus bas qu’apparaissent les plus belles choses…

Dieu parle à Samuel, il l’appelle : il n’y a que Samuel qui puisse l’entendre (Eli ne l’entend pas), comme une parole intérieure, au fond de son cœur ! Dieu procède toujours ainsi, nous aussi, il nous appelle chacun. C’est ce qu’on désigne par « vocation ». La vocation, ce n’est pas seulement pour les pasteurs, les pompiers ou les infirmières, mais Dieu appelle chacun à faire quelque chose pour lui. La difficulté, c’est de l’entendre et de le comprendre. Pour Samuel, comme pour nous, on voit bien que ce n’est pas évident, il ne comprend pas tout de suite. Il a fallu que Dieu l'appelle trois fois, comme s'il fallait un certain temps d'apprentissage, un certain temps pour comprendre que c'est Dieu qui appelle et qui parle. Il a fallu du temps pour que la vocation de Samuel soit reçue et comprise !

La difficulté, c'est justement de reconnaître la voix de Dieu : ici, c'est Eli qui a pour rôle de rendre Samuel attentif à l'appel de Dieu, de lui expliquer que cette voix, ce n'est pas la sienne, mais c'est bien celle de Dieu. C'est peut-être aujourd'hui le rôle de la communauté d'aider chacun à être attentif à cet appel ? Et c’est encore plus difficile parce que Dieu ne nous parle pas forcément avec nos mots courants, à « haute voix », mais il parle plutôt à notre cœur, à notre esprit, il parle surtout en mettant dans notre tête de « bonnes idées », de « bons sentiments ». Peut-être faut-il apprendre à faire silence en soi pour entendre, à s’arrêter d’agir pour réfléchir et comprendre ?

Et c’est ce qui arrive quand on prie. Samuel comprend qu'il est appelé à quelque chose, mais n'a pas encore une grande connaissance de Dieu. C'est Eli qui va lui expliquer comment s'adresser à Dieu, comment prier ! Eli dit que le meilleur moyen de répondre à Dieu est de se déclarer son serviteur, et de lui demander de nous parler. Eli explique à Samuel que la prière, c’est d’abord apprendre à écouter Dieu en se présentant à son service : « Parle, Eternel, car ton serviteur écoute ».

Beaucoup de gens pensent que prier, c’est demander une multitude de choses à Dieu, un peu comme l’énumération d’une liste de courses, ou encore une lettre au père Noël. En réalité, prier, c’est surtout écouter ce que Dieu a à nous dire. C'est dans une relation personnelle à Dieu que l'on peut trouver son chemin, sa vocation, sa manière de le servir. Car la vraie relation à Dieu, ce n'est pas un système d'échanges ou de chantage : plus on prie, plus Dieu agirait ! Au contraire, la vraie relation à Dieu, c'est que nous, nous le servions, et pour bien le servir, il faut l'écouter, afin de découvrir sa volonté et de comprendre comment agir : ce que nous attendons de Dieu, c’est à nous de le faire, c’est à nous de le servir !
Ce n’est pas facile, et il faut apprendre, Samuel n’y arrive pas tout de suite non plus, même s'il habite au temple !

Dieu appelle Samuel par son prénom. Certes, Dieu nous appelle d'une façon globale, il appelle toute l'humanité: « vivez-en paix entre vous, soyez serviteurs, soyez fidèles, aimez-vous les uns les autres... ». Mais Dieu a aussi une relation personnelle avec chacun et nous connaît par notre nom : « Ne crains rien, je t’ai libéré, je t’ai appelé par ton nom, tu es à moi... », Esaïe 43:1, souvent lu au moment des baptêmes. Dieu a des projets pour chacun, personne ne peut dire à notre place ce que Dieu attend de nous, c’est à nous de le découvrir.

Avant, dans la religion plus ancienne, l’idée était que Dieu avait déjà dit par Moïse tout ce qu’il fallait faire pour lui. Il suffisait donc d’obéir aux 10 commandements donnés à Moïse, ou selon la tradition rabbinique, aux 613 commandements contenus dans la Torah. On croyait aussi, par exemple, qu’il suffisait d’offrir des sacrifices à Dieu pour obtenir de lui quelque chose, comme un système de troc !

Mais ici, Eli inaugure pour Samuel un nouveau mode de relation à Dieu. Il ne s’agit pas juste d’obéir à des commandements tout faits, ni même d’obéir à un maître ou un supérieur. Eli ne dit pas à Samuel ce qu’il doit faire dans sa vie. Mais il l’invite à une relation directe avec Dieu, sans intermédiaire, et à trouver lui-même, dans sa relation à Dieu, ce qu’il convient de faire.

C’est d'ailleurs tout à fait le mode de vie religieuse que préconise la Réforme protestante depuis le début. Dans certaines régions, les protestants avaient même l’habitude, en se levant le matin, de penser en premier à Dieu et leur première parole était pour Dieu : « voici ton serviteur » ou « voici ta servante ».

Dieu a besoin de serviteurs : c'est à nous d'agir dans le monde ! Car nous avons dans le monde un rôle d'action, de responsabilité ! Comme Samuel, il s'agit pour nous de savoir que nous sommes serviteurs de Dieu, que nous pouvons faire des choses pour lui, même si nous sommes petits comme l'était Samuel !

Bien plus tard, Jésus ne dira pas autre chose et nous incitera toujours à être les serviteurs les uns des autres.

Écouter est la base de toute la vie du chrétien : savoir écouter, écouter les autres, écouter nos corps, écouter la nature, écouter le silence, écouter Dieu. Être prêt à l’action en sachant d’abord écouter ce que Dieu veut nous dire !

« Parle, Seigneur, ton serviteur écoute »

Louis Pernot - Muriel Bernhardt