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56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

De quelle Eglise avons-nous besoin ?

 

Les protestants sont souvent tiraillés entre deux tentations, celle d'avoir une Eglise forte, et celle de ne pas avoir d'Eglise du tout.

Oui, c'est vrai, une Eglise forte, ce serait bien : une Eglise qui structure la vie de ses fidèles, une Eglise visible, spectaculaire peut-être, une Eglise dont on parle et qui parle, une Eglise qui se montre, qui compte dans le monde. Qui ne regrette pas la discrétion de la Fédération Protestante de France trop souvent, ou même la discrétion des protestants en général ?

Pourtant, nous sommes heureux d'avoir une Eglise légère, qui ne prétend pas nous imposer ce qu'il faudrait croire ou faire, une Eglise discrète qui nous laisse libres, qui ne parle pas à notre place, une Eglise qui ne s'interpose pas entre Dieu et nous, une Eglise qui nous laisse dans la simplicité de notre foi individuelle à Dieu, sans trop interférer ou faire de l'ombre à notre liberté.

Ce balancement existe aussi dans notre attitude vis-à-vis de la liturgie. Nous regardons avec un peu d'envie parfois les beautés de certaines liturgies orientales, et en même temps nous aspirons à des liturgies plus modernes, plus simples, parlant plus directement à nos esprits...

Si nous étions vraiment fidèles à l'esprit du Christ, nous pourrions avoir une attitude très radicale : le Christ n'a institué aucune Eglise, pas de liturgie, n'a imposé aucune pratique, ni de dogme, ni même de morale directement applicable. Il était au-dessus de tout ça, et il semble bien qu'il considérait toutes ces choses comme purement humaines, relatives, et distinctes de la pure vérité.

Devrions-nous alors comme les Quakers n'avoir ni sacrements, ni liturgie, ni organisation cléricale ou pastorale ? C'est bien tentant. Et dans le fond, je crois que ce sont eux qui sont dans le vrai. La religion non seulement n'est pas dans les rites et dans les institutions, ni dans leurs représentants, mais tout cela peut même faire du tort et masquer la vraie religion, nous éloigner de l'essentiel.

Pourtant, le Christ semble ne pas avoir été en soi contre les institutions, mais plutôt contre l'hypocrisie, ou contre toute forme de religion qui se substituerait à Dieu lui-même et à son simple commandement d'amour. Il semble aussi que de son vivant, il ait pratiqué le judaïsme, certainement pas comme un intégriste, mais avec recul, et en prenant de grandes libertés. Il n'a jamais dit qu'il faille se débarrasser de tout rite, mais il a montré qu'il fallait veiller à ce que ceux-ci ne passent pas au premier plan.

Ainsi pouvons-nous accepter d'avoir des organisations d'Eglise et des rites. Il en faut bien pour être efficaces, pour pouvoir transmettre la foi, et pour la partager. Mais il faut absolument que tout cela reste le plus léger possible pour laisser la première place à Dieu lui-même, à la foi et à la recherche personnelle.

Louis Pernot