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56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

Les protestantismes

(Propositions pour une foi contemporaine)

 

Luthériens et réformés

Le protestantisme n’étant pas défini par une doctrine (dogmes), ni par un pouvoir centralisé d’autorité divine (pape), il est nécessairement très divers. Il n’y a donc pas une seule Eglise protestante, mais beaucoup et de taille très diverses.

Normalement, pour toutes les Eglises protestantes, la seule autorité, c’est la Bible. La diversité des Eglises protestante viendra en particulier dans la façon avec laquelle elles gèrent leur rapport à l’Ecriture. A une extrême, certaines la liront à la lettre considérant qu’elle et en tant que telle « parole de Dieu ». Ce sont ceux qu’on appelle les fondamentalistes. A l’autre extrême, certaines Eglises prendront un recul critique par rapport à la Bible en disant qu’elle a été écrite par des hommes dans un contexte particulier, et qu’il faut donc ne pas la prendre à la lettre, mais la remettre dans son contexte historique et culturel, et qu’elle a été écrite plus pour faire réfléchir que pour être crue ou appliquée, c’est la tendance dite libérale.

Le courant historique majoritaire de la Réforme en Europe se divise en deux branches : les luthériens et les calvinistes. Luther a commencé la Réforme en Allemagne, donc en gros les allemands et les pays nordiques sont luthériens, et Calvin a continué en France et en Suisse, et donc les français et les suisses sont calvinistes. Mais l’Eglise d’origine calviniste aime mieux se faire appeler « Eglise Réformée » pour ne pas laisser croire qu’elle se définirait comme seulement défenseuse de la pensée de Calvin. Calvin n’est ni un saint, ni même une autorité suprême, il a lancé un mouvement de réforme, il a eu une certaine idée d’une Eglise organisée démocratiquement centrée sur l’annonce de la Parole et de la Grace, c’est ce principe qui demeure, mais « l’Eglise Réformée est  toujours en réforme » comme dit un adage. Elle doit donc continuer d’évoluer et de s’adapter à la culture et au monde dans lequelle elle est appelée à proclamer la Bonne Nouvelle, elle est l’Eglise de ceux qui la constituent aujourd’hui.

En Alsace, entre les deux cultures c’est à peu près moitié luthériens et moitié réformés.

Théologiquement Luther et Calvin étaient très proches, on peut juste dire que Calvin est allé un peu plus loin que Luther dans la Réforme vers un culte plus simple et dépouillé s’éloignant de la liturgie catholique. Les luthériens ont des temps liturgiques avec des couleurs spécifiques, ils ont des croix avec Jésus représenté dessus, et certains font le signe de croix. Le culte calviniste est plus dépouillé, plus simple, une liturgie moins abondante, moins centrée sur la Cène, et pas de couleurs liturgiques, pas de bougies, le moins de chose possibles qui détourneraient de l’annonce de la Parole.

A l’origine, dans les temples calvinistes, il n’y avait même pas d’orgue, pas de musique, la seule musique autorisée était le chant des Psaumes à l’unisson et sans accompagnement. La chaire était monumentale et au centre dans l’alignement du temple qui n’avait aucune autre décoration que des versets de la Bible peints sur les murs. La communion était très rare (quatre fois par an) et il n’y avait donc pas de table de communion, on montait juste une planche avec des trétaux et une nappe les grands jours. Le centre était donc clairement la lecture de la Bible et la prédication : volonté de l’interpréter pour la mettre à la portée des fidèles. De nos jours, les orgues sont revenus dans nos temples, et la table de Communion reste à demeure, et elle porte une Bible ouverte les jours où il n’y a pas de sainte Cène pour montrer que pour nous le centre de tout et ce qui donne la présence réelle de Dieu, c’est la Bible ouverte et lue.
Mais donc, à part des habitudes liturgiques un peu différentes à certains endroits, rien d’essentiel semblait séparer les luthériens et les réformés. En France ils se sont donc réunis en une seule Eglise en 2012 pour former l’Eglise Protestante Unie de France, chaque paroisse pouvant garder ses particularités et ses habitudes liturgiques.

Au sein de l’Eglise Protestante Unie, il y a aussi plusieurs tendances théologiques, mais globalement la majorité adopte une attitude respectueuse mais critique vis à vis de la Bible en pensant qu’on ne peut pas l’appliquer à la lettre, mais qu’elle a besoin d’être comprise en rapport au contexte où elle a été écrite, et qu’elle doit être réinterprétée.


L’organisation démocartique de l’Eglise

Dés le début, les églises réformées ont été organisées selon un modèle démocratique d'autant plus exemplaire qu'il était alors presque unique. Cette structure s'appelle le système presbytérien-synodal, parce que les décisions sont prises en deux lieux: les conseils presbytéraux et les synodes.

Chaque paroisse est organisée comme une association « loi de 1905 ». Ceux qui ont demandé à être inscrits comme membres ont droit de vote lors de l'assemblée générale qui a lieu une fois par an. Cette assemblée générale élit le conseil de laïcs qui dirige la paroisse, et qui s'appelle conseil presbytéral. Chaque conseiller est élu pour un mandat renouvelable de cinq ans. Le pasteur est membre de droit de ce conseil. Le conseil presbytéral élit un président. C'est ce conseil qui prend toutes les décisions qui concernent la vie de la paroisse, et qui, en particulier, nomme son pasteur. Il gère le budget qui est alimenté par les cotisations des paroissiens. Une bonne partie de ce budget est versée à l'Union nationale qui rémunère tous les pasteurs de la même manière dans toute la France.Tous les six ans, le conseil presbytéral peut décider de changer de pasteur, et le pasteur qui envisage de changer de paroisse peut prendre contact avec les conseils presbytéraux eux-mêmes en recherche. La décision de sa nomination sera prise d'un commun accord.

L'autre instance de prise de décisions est le synode. Chaque conseil presbytéral  choisit parmi ses membres le délégué qui siège au synode régional annuel avec le pasteur. Le synode régional prend les décisions concernant l'ensemble de la région. Il élit un conseil régional qui, avec son président,  a pour rôle de gérer la coordination de toutes les paroisses de la région. Ce rôle n'est ni doctrinal ni hiérarchique, il est administratif et humain.

Les synodes de chaque région élisent aussi des délégués, pasteurs et laïcs, pour siéger au synode national. Lui aussi est annuel. Il peut  prendre les décisions concernant la vie de l'ensemble de l'Eglise Réformée. Eventuellement, il modifie la discipline, qui règle le fonctionnement général de l'Eglise en laissant la plus grande liberté à chaque paroisse. Le conseil national, élu par ce synode, permet d'avoir au cours de l'année une action suivie. 


Les autres Eglises Protestantes.

L’abscence d’un pouvoir centralisé comme le « magistère » catholique du pape fait qu’il y a une grande diversité d’Eglises protestantes. En dehors des deux grands courants traditionnels luthériens et réformés se trouvent toutes les Eglises dites « évangéliques ». Elles se distinguent par différentes caractéristiques.

D’une part dans leur rapport à la Bible. Toutes les Eglises protestantes ont pour centre la révélation biblique, mais elles diffèrent dans la façon avec laquelle elles considèrent la Bible. On peut dire que les Eglises évangéliques ont une lecture plus littérale de la Bible que dans l’Eglise Protestante Unie. A l’extrême, certaines sont « fondamentalistes », croyant tout à la lettre ce qui est écrit, donc la création du monde en 7 jours, les miracles de Jésus, la résurrection corporelle, et aussi à partir de Paul la condamnation de l’homosexualité et l’interdiction aux femmes de parler dans l’église, donc le pastorat féminin. D’autres prennent un peu plus de distance, mais restent toujours attachées à ce qu’elles appelle «l’innerrance de l’Ecriture » : la Bible ne peut pas se tromper. On peut dire que dans le protestantisme, là où les Eglises réformées et luthériennes privilégient le « sola gratia » : la prédication de la grâce, donc l’accueil de tous, les Eglises évangéliques privilégient le « sola scriptura » : l’Ecriture seule prise comme norme dogmatique et morale.

Pour rester dans les grands principes partagés par les protestants, on peut dire que ce qui distingue en effet les différentes Eglises est surtout la hiérarchie, l’ordre dans lequel elles les mettent.
Ainsi là où les Eglises réformées et luthériennes privilégient comme nous l’avons dit le « sola gratia », les Eglises évangéliques privilégient le « sola fide » : la foi seule. Ainsi dans les Eglises évangéliques, ce qui sera  mis comme le fondement de l’Eglise sera la foi des fidèles. Ce sont des Eglises dites « confessantes », formées de fidèles normalement tous pratiquants et engagés.

L’entrée des ces Eglises se fait par un acte de foi, normalement le baptême d’adulte, parfois par immersion. Dans les Eglises luthérienne et réformée, tous sont bienvenus, sans préjuger de la qualité de leur foi ou de leur engagement, ce sont des Eglises dites « multitudinistes », ou de multitude. On y trouve donc toute sorte de paroissiens, certains très pratiquants et d’autres pas du tout. Peut être considéré comme membre chacun qui accepte d’entendre le message de la grâce de Dieu. Ce qui est premier alors ce n’est pas la réponse du fidèle, mais l’appel de Dieu, représenté par le baptême d’enfant : celui-ci ne peut évidemment pas dire sa foi, mais il est présenté par ses parents comme étant au bénéfice de la grâce première de Dieu.

Les Eglises évangéliques donc ne baptisent pas les bébés et  pratiquent le baptême d’adultes. Certaines le font par immesion totale dans l’eau, ces sont les Eglises baptistes. D’autres pratiquent le « parler en langues »,  ce sont des prières libres où celui qui prie de laisse saisir par le saint Esprit (ou son émotion selon nous), pour finalement dans un certain état d’exaltation prier avec des mots incompréhensibles. Cela est le propre des Eglises dites Pentecôtistes, en référence à la Pentecôte où il est dit que les disciples se sont mis à parler toutes les langues.  Dans ces Eglises, le culte est moins structuré que dans les Eglises traditionnelles, il n’y a pas vraiment de liturgie imposée, mais une succession de chants et de prières libres, de la part de l’officiant ou de membres de l’assemblée.

Ainsi pourrait-on dire aussi, les Eglises évangéliques ont toutes, à des degrés divers une tendance à vivre leur foi de manière « charismatique », c’est-à-dire avec émotion et d’une manière extériorisée. Dans les Eglises réformées, la foi est considérée comme quelque chose de très personnel, il n’y a pratiquement pas d’expression publique de sa foi, le culte est très dépouillé et intériorisé, plutôt intellectuel. Dans les Eglises évangéliques, la foi peut être vécue d’une manière très extériorisée, il y a une grande place pour la Bible et la prédication, mais aussi beaucoup pour l’émotion et la ferveur collective.

Le danger des Eglises de multitude comme l’Eglise réformée, c’est de devenir trop tolérante au point d’être laxiste et de tout accepter. Le danger des Eglises Evangéliques, c’est de devenir sectaire en considérant que ceux qui n’expérimentent pas leur foi comme eux ne seraient pas vraiment convertis et donc authentiquement chrétiens.

Quoi qu’il en soit, il en faut pour tous les goûts, certains aiment les liturgies spectaculaires, et aimeront l’orthodoxie pour cela, d’autres que la foi soit bien cadrée et se sentiront bien dans l’Eglise catholique. D’autres encore aiment l’Eglise réformée pour sa capacité à s’adapter au monde moderne, et à mettre la foi à sa juste place, et certains se sentent bien dans des Eglises évangéliques parce qu’ils ont besoin d’une communauté moins grand-ouverte, avec plus d’exigences, une foi plus cadrée et moins pudique.

Cette diversité du protestantisme est certainement une chance, le tout est de rester ouverts sur les autres manières de vivre sa foi que sur la sienne propre.

 

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